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D'autres prix Nobel 2008 (physique, physiologie/médecine, chimie)


Rédigé le Jeudi 9 Octobre 2008 à 19:02 | Lu 958 commentaire(s)



Le prix Nobel de physique 2008

récompense des travaux visionnaires dans le domaine de la physique des particules faisant intervenir la notion capitale de symétrie brisée. Les trois lauréats sont tous d’origine japonaise même si l’un d’entre eux, Yoichiro Nambu, a été naturalisé Américain. Le deux autres récipiendaires, Makoto Kobayashi et Toshihide Maskawa se sont illustrés, tout comme Nambu, par leurs travaux sur la théorie des interactions nucléaires.
Au cœur des équations de la physique moderne se trouve la notion fondamentale de symétrie. Un système physique est symétrique s'il reste invariant sous l’action d’une opération de transformation quelconque. Ainsi, une sphère est-elle invariante par rotation, un réseau cristallin parfait apparaîtra invariant selon certaines opérations de translation, etc. Il se trouve que les équations décrivant les phénomènes du monde, particulièrement celles respectant les lois de la mécanique quantique et de la théorie de la relativité sont presque uniquement fixées par des exigences d’invariances par des opérations de symétries.
Ainsi l'impossibité de déterminer, à l'aide d'expériences de mécanique et d’optique, si l’on est au repos ou en mouvement à une vitesse rectiligne uniforme, tout comme l'invariance de la vitesse de la lumière dans des référentiels en mouvements relatifs, imposent aux lois de la physique des restrictions qui se manifestent par la théorie de la relativité restreinte d’Einstein, avec l’équivalence de la masse et de l’énergie, la dilatation du temps et bien d’autres conséquences.
Toutefois, si les équations doivent rester invariantes, certaines de leurs solutions peuvent ne pas être symétriques dans un sens donné : on parle alors de brisure spontanée de la symétrie. L’exemple le plus connu est celui d’un crayon en équilibre sur sa pointe. L’ensemble est invariant par rotation mais, si le crayon tombe, il déterminera une direction particulière de l’espace et la symétrie aura ainsi été brisée.

Rien ne distingue les directions autour de la pointe. Mais en tombant, le crayon en choisit une. Pourquoi ? Crédit : nobelprize.org
Dans les années 1930, cette notion a été utilisée par l’un des créateurs de la mécanique quantique, Werner Heisenberg, pour expliquer le ferromagnétisme, c'est-à-dire le fait que sous une certaine température critique, des matériaux pouvaient s’aimanter spontanément. Si l’on compare des atomes à des petits aimants, orientés dans n’importe quelle direction par l’agitation thermique à haute température, l’ensemble n’est pas orienté en moyenne dans une direction donnée. Il y a donc bien invariance par rotation. Mais à plus basse température, les aimants atomiques finissent par s’orienter spontanément dans une seule direction et un objet macroscopique devient aimanté : la symétrie par rotation a été brisée.

Yoichiro Nambu. Crédit : Chicago University
C’est ce genre de phénomène que Yoichiro Nambu, né au Japon en 1921 et aujourd'hui naturalisé Americain, a transposé dans le domaine de la théorie quantique des champs de particules, à partir d’un exemple utilisé pour décrire une autre propriété de la matière condensée, la supraconductivité. En 1960, il a ainsi proposé d’appliquer la notion de symétrie brisée d’Heisenberg à la théorie des interactions nucléaires entre nucléons, prolongeant ainsi les travaux de son compatriote japonais, Hideki Yukawa, qui avait introduit le pion (un méson).
Ce faisant, cela revenait à supposer que le pion était une particule composite, anticipant de quelques années la théorie des quarks de Gell-Mann, Zweig et Ne’eman !

Nambu le prophète
Au cours des années qui suivirent, Nambu fit bien plus fort. Il fut le premier à proposer que les interactions nucléaires fortes devaient être décrites par une théorie des champs de type Yang-Mills avec le groupe de Lie SU(3). C’est exactement ce que Gell-Mann et d’autres reprendront des années plus tard dans le cadre de la chromodynamique quantique. Yoichiro Nambu est donc le père de la notion de couleur pour les quarks.
La théorie de la brisure de symétrie dans le domaine des particules élémentaires de Nambu n’était cependant pas conforme aux règles de la relativité restreinte et c’est justement pour remédier à ce défaut que Peter Higgs, François Englert et Robert Brout introduiront simultanément et quelques années plus tard le fameux mécanisme de Higgs-Englert-Brout, que l’on suppose être à l’origine des masses du modèle standard.
A la fin des années 1960 et au tout début des années 1970, la célébrité de Nambu était telle que certains n’hésitaient pas à dire que si quelqu’un voulait savoir quelles seraient les prochaines révolutions en physique, il fallait suivre les articles de Yoichiro Nambu !
S'ils ont raison, alors la prochaine découverte fondamentale en physique devrait bien être celle de l’exactitude de la théorie des cordes... Car c’est lui qui démontra le premier, bien que simultanément avec Léonard Susskind, que la fameuse amplitude de Veneziano pour le modèle dual des hadrons pouvait être interprétée comme une excitation d’une corde. C’est pourquoi l’équation fondamentale de la théorie des cordes bosoniques est aujourd’hui appelée l’Action de Nambu-Goto.

L'équation portant le nom d'Action de Nambu-Goto. Crédit : Universe review
Le prix Nobel 2008 lui est donc justement attribué pour moitié alors que lui-même vit toujours aux Etats-Unis où il exerce en tant que Henry Pratt Judson Distinguished Service Professor Emeritus au Département de Physique de l’Institut Enrico Fermi.

Le reste du prix Nobel est lui attribué conjointement à deux Japonais, Makoto Kobayashi, 64 ans, professeur honoraire du centre de recherches de Tsukuba, et Toshihide Maskawa, 68 ans, professeur honoraire à l'Institut de physique théorique Yukawa.

Makoto Kobayashi. Crédit : KEK
Toshihide Maskawa. Crédit : Skobeltsyn Institute of Nuclear Physics (SINP)
En 1972, ils s'intéressèrent à la découverte d’une autre symétrie brisée en physique, la violation CP, qui implique que certaines réactions entre particules élémentaires ne se produisent pas avec une même probabilité si l’on remplace chaque particule par son antiparticule et que l’on considère l’image dans un miroir du dispositif expérimental avec les antiparticules à la place des particules. Kobayashi et Maskawa cherchèrent si le modèle des interactions nucléaires forte et faible connu à l’époque était susceptible de contenir cette violation de la symétrie CP.
Ils découvrirent que cela n’était possible que s'il existait non pas trois types de quarks comme on le pensait à l’époque mais six, rangés en trois familles. Aux quarks dit u, d et s connus alors devaient nécessairement être ajoutés les quarks qui seront nommés plus tard c, b, et t. Cette remarquable prédiction devait être vérifiée par la suite et impliquer l’existence de trois types de neutrinos formant trois familles de leptons, étroitement associées pour la cohérences de la théorie des interactions électrofaible et à la chromodynamique quantique, la QCD, aux trois précédentes familles de quarks.
Généralisant les travaux de l’Italien Nicola Cabibbo, les deux chercheurs introduisirent une matrice qui deviendra fameuse sous la nom de matrice CKM, ou matrice de Cabibbo-Kobayashi-Maskawa.

La matrice CKM. Crédit : physorg.com
Comme on peut le voir ci-dessus elle se représente sous forme d’un tableau de nombres avec trois lignes et trois colonnes. Les indices pour les nombres dans cette matrices sont u, d, s, c, b et t. Ce n’est pas un hasard car ces nombres indiquent, élevés au carré, des probabilités de transformation des types de quarks les uns dans les autres en raison des interactions électrofaibles.
Les travaux de Kobayashi et Maskawa sont devenus importants pour comprendre la violation CP, notamment avec des mésons portant des quarks b et une expérience entière au LHC sera consacrée à ce problème. Il s’agit bien sûr du détecteur LHCb.
Cette violation CP constitue aujourd'hui un ingrédient fondamental des fameuses conditions de Sakharov pour espérer comprendre pourquoi et comment notre Univers est devenu dominé par la matière

Source: Futura sciences


Le prix Nobel 2008 de physiologie et de médecine

Luc Montagnier et sa collègue Françoise Barré-Sinoussi viennent d'être récompensés par le prix Nobel de médecine pour leur découverte en 1983 du virus du Sida, en même temps que l'Allemand Harald zur Hausen pour celle du papillomavirus, responsable du cancer du col de l'utérus.
Les virus sont mis à l'honneur par le jury du prix Nobel 2008, dont le prix de physiologie et de médecine vient récompenser les deux découvertes anciennes, totalement indépendantes, de virus aujourd'hui célèbres, le VIH et le papillomavirus.

La moitié du prix de 1,02 million d'euros ira à Harald zur Hausen. Dès le début des années 1970, à l'université d'Erlangen-Nuremberg, en Bavière, ce chercheur allemand spécialiste de virologie s'intéresse aux Human Papilloma Virus, alias HPV. Il les trouve associés à des tumeurs du col de l'utérus et il émet l'hypothèse que ce parasite est bien à l'origine de cette forme de cancer. Ses travaux, menés dans différentes institutions, lui ont ensuite valu quelques déconvenues mais aussi plusieurs prix prestigieux. A partir du tout début des années 1990, la responsabilité du papillomavirus dans le cancer du col de l'utérus a été largement admise.

L'autre moitié du Nobel 2008 de médecine récompense deux Français (la dernière occurrence remonte à 1980 et au prix Nobel de Jean Dausset), Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi. En 1983, la seconde travaille dans le laboratoire du premier, à l'Institut Pasteur. Avec Jean-Claude Chermann, l'équipe isole un nouveau rétrovirus, baptisé LAV (Lymphodenopathy Associated Virus) et l'estime responsable de cette maladie récente, appelée Sida (Syndrome d'immunodéficience acquise), en progression rapide. Leurs résultats paraissent le 20 mai dans la revue Science.
Il s'en suivra une longue polémique avec une équipe américaine, celle du professeur Robert Gallo, qui annonce en avril 1984 avoir découvert le véritable virus du Sida, le HTLV-III. Avec la demande de brevet pour un test de dépistage déposé aux Etats-Unis par l'Institut Pasteur, l'enjeu se fait économique et la controverse devient une affaire d'Etat, qui aboutit à un accord signé par les deux présidents de l'époque, Jacques Chirac et Ronald Reagan, statuant que les deux équipes sont « co-découvreurs ». Ce règlement diplomatique ne clôt pas l'affaire, qui se poursuit pendant des années avec des révélations sur quelques falsifications par l'équipe de Robert professeur Gallo. En 1994, l'Institut national de la santé américain (NIH) reconnaît la paternité de la découverte du virus à l'équipe française et la polémique entre les deux chercheurs (qui sont toujours restés en contact) s'arrête enfin.

Pendant ce temps, le virus LAV a changé de nom et s'appelle désormais VIH (virus de l'immunodéficience humaine) ou HIV en anglais. Il s'est également trouvé un petit frère et on parle maintenant du VIH-1 et du VIH-2.
Depuis, le principal espoir initial né de cette découverte, celui de créer un vaccin, recule toujours, à cause de la complexité du phénomène. Mais Luc Montagnier, 76 ans, croit toujours à un vaccin thérapeutique, comme il vient de le rappeler, en dédiant son prix à tous les malades du Sida et en rappelant que ce « fléau mondial » touche aujourd'hui près de 1% de la population humaine.
Françoise Barré-Sinoussi n'a jamais cessé de travailler sur cette maladie depuis 1983. Auteur ou co-auteur de 200 publications sur le sujet, elle a reçu la Légion d'honneur (comme Luc Montagnier) et participe à l'Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites (ANRS

Source: Futura Science


Prix Nobel de chimie 2008 pour une protéine fluorescente

Par Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences
Deux Américains, Roger Tsien et Martin Chalfie, et un Japonais, Osamu Shimomura, sont récompensés par le prix Nobel de chimie 2008 pour la découverte de la protéine fluorescente GFP et la mise au point de son utilisation comme marqueur. Un honneur mérité pour un travail qui a fait progresser à pas de géant notre connaissance du vivant.

Depuis une dizaine d'années, biologistes et médecins ont une nouvelle arme pour étudier les cellules, les tissus, ou les fonctions vitales : la GFP, Green Fluorescent Protein. Devenue un outil banal, elle figure aujourd'hui parmi les accessoires d'innombrables laboratoires dans le monde. On peut la décrire comme un colorant d'un genre particulier, que l'on incorpore dans le génome pour mettre en évidence la production d'une certaine protéine. Les biologistes s'en servent désormais pour étudier les tumeurs, les neurones, l'activité d'enzymes, le mouvement des spermatozoïdes, le fonctionnement de capteurs biologiques ou encore pour mettre au point des moyens de lutte contre la malaria. On a même vu des souris et des porcs entièrement fluorescents...
Dès les débuts de la microscopie, les biologistes ont constaté l'importance de la coloration pour rendre visibles les structures cellulaires, qui, à l'état naturel, sont transparentes sous l'œil du microscope. Un homme de l'art sait utiliser les bonnes molécules pour colorer ce qu'il veut observer, membrane cellulaire, protéines, sucres, graisses, ADN, tumeurs, etc.
L'idée d'utiliser des molécules fluorescentes est ancienne. Réémettant une lumière d'une certaine couleur lorsqu'ils sont éclairés, ces colorants originaux ont donné naissance à la microscopie par fluorescence, ensemble de techniques faisant appel à des microscopes spéciaux. Mais ces molécules lumineuses ont longtemps été toxiques, limitant leur usage.

Osamu Shimomura, l'homme qui a découvert la GFP.
Le cadeau de la méduse
Il y a bientôt un demi-siècle, au début des années 1960, un biologiste marin qui était aussi chimiste, le Japonais Osamu Shimomura, s'est intéressé à une méduse du Pacifique, Aequorea victoria, capable, comme d'autres organismes marins, d'émettre de la lumière par fluorescence. Ce cnidaire utilise deux molécules, l'une (baptisée aequorine) émettant une lumière bleue (395 nanomètres étant l'idéal) qui excite la seconde, la GFP, petite protéine de 238 acides aminés, laquelle réémet une lumière verte (508 nanomètres). Ses résultats sont publiés en 1962 mais la GFP n'éveille pas tout de suite l'intérêt des biologistes.
Dans les années 1980, un Américain, Douglas Prasher, émet une idée originale. Si l'on parvient à installer le gène de la GFP juste après un gène produisant une certaine protéine, celle-ci, lorsqu'elle sera fabriquée, portera une séquence supplémentaire, celle de la GFP. Elle deviendra ainsi visible pour peu qu'on l'éclaire avec une lumière bleue. Voilà un moyen d'étudier la production d'une protéine, dans des cellules en culture voire, pourquoi pas, chez un organisme vivant.

Martin Chalfie, celui qui a découvert comment intégrer le gène de la GFP à un endroit quelconque du génome.
C'est Martin Chalfie qui concrétisera cette brillante idée en 1994 en rendant fluorescentes deux vedettes des laboratoires, la bactérie Escherichia coli et le vers Caenorhabditis elegans (un nématode). L'année suivante, Roger Tsien réussit à mettre au point des variantes de GFP de couleurs différentes, obtenues par mutation de son gène. Le bleu, le cyan et le jaune viennent ainsi compléter le vert naturel de la GFP de la méduse. Une autre protéine naturelle, DsRed, rougeâtre comme son nom l'indique, est ensuite découverte chez un organisme marin, un corail. Grâce à cette palette colorée, les chercheurs peuvent mettre en évidence simultanément plusieurs phénomènes.

Roger Tsien, qui apporta la couleur...
Ces techniques n'ont depuis cessé de se diversifier pour ouvrir de nouvelles possibilités. Des animaux (souris, porcs, chats...) sont ainsi devenus entièrement ou partiellement fluorescents. Ils peuvent alors servir à suivre facilement le devenir ou l'activité de certains types de cellules, neurones, tumeurs, cellules souches...
Ce n'est pas la première fois qu'un prix Nobel vient récompenser non pas une découverte purement scientifique mais une technique. Ernst Ruska, par exemple, a obtenu le Nobel de physique en 1986 pour l'invention du microscope électronique. Mais dans tous les cas, il s'agit, comme ici, d'un moyen largement adopté par la communauté des chercheurs et qui a notablement fait progresser la science.
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Source: Futura Science

Il reste à decerner le prix Nobel pour l'économie et la paix (respectivement decernés les 10 et 13 octobre prochains).




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