Le syndicat CGT du centre hospitalier spécialisé de Sarreguemines et plusieurs agents de cet établissement ont saisi le juge administratif d’un recours contre des notes du directeur de l’hôpital relatives à la notation des psychologues. Suite au rejet de leur recours par un juge unique du tribunal administratif de Strasbourg, ils ont interjeté appel. La cour administrative d’appel de Nancy relève tout d’abord qu’aux termes de l’article R. 222-13 du code de justice administrative, ce sont les litiges relatifs « à la situation individuelle des agents publics » qui peuvent être jugés par un magistrat statuant seul et qu’en l’espèce, le litige ne portait pas sur la situation individuelle d’agents. Evoquant l’affaire, la cour considère ensuite :
« que pour l’application [de l’article 65 de la loi du 9 janvier 1986], le directeur du centre hospitalier de Sarreguemines, détenteur du pouvoir de fixer les notes et appréciations relatives aux psychologues de la fonction publique hospitalière exerçant leurs fonctions au sein des différentes équipes médicales, ne pouvait déléguer son pouvoir hiérarchique aux médecins-chefs, ni le pouvoir qu’il détient de procéder à leur évaluation professionnelle en vue de procéder à leur notation ; que par suite, les décisions du directeur du centre hospitalier de Sarreguemines en date du 1er juillet 2003, qui procèdent à une telle délégation, sont entachées d’erreur de droit et doivent être annulées. » (CAA Nancy, 22 juin 2006, Syndicat CGT du centre hospitalier spécialisé et autres, n° 04NC00897).
Evaluation
Elle est de deux ordres :
- subjective, en lien avec l’éthique
- objective et matérialisée, en lien avec le droit
La responsabilité, au sens juridique, définit les règles selon lesquelles une personne physique ou morale est susceptible de répondre des conséquences dommageables de ses actes ou de ses abstentions.
Il existe 4 types de responsabilités :
- la responsabilité administrative et la responsabilité civile (vise le dédommagement)
- la responsabilité disciplinaire/ordinale qui sanctionne un manquement aux obligations professionnelles ou déontologiques
- la responsabilité pénale qui réprime d’une infraction réprimée par le code pénal, le code de la santé publique ou d’autres textes spécifiques
I - LA RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE
Elle est liée à l’activité des services publics. L’hôpital est ainsi engagée en cas de faute de ses agents et de faute de service.
LA RESPONSABILITE DE L’HOPITAL
Dans quel cas peut elle être engagée :
1° La responsabilité pour faute :
« I.-Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. » (art. L. 1142-1 du CSP)
Soigner : une obligation de moyens :
L’obligation de moyens signifie, en droit, que la personne en charge de cette obligation doit réunir tous les moyens en sa possession pour accomplir son obligation. Cependant, dès lors que tous ces moyens ont été mis en œuvre, l’absence de résultat ne peut en aucun cas entraîner la mise en cause de la responsabilité de la personne tenue de cette obligation.
Seule une faute de la personne pourra entraîner sa responsabilité. Il ne s’agit pas de l’obligation de résultats.
Il découle de l’obligation de moyens du médecin que la responsabilité médicale est une responsabilité pour faute, c'est-à-dire que le médecin n'est condamné que si la victime rapporte la preuve d'une faute à son encontre.
Il en existe 2 sortes de responsabilité avec faute:
1 - La responsabilité administrative liée à la pratique médicale : Faute commise par le médecin ou les professions de santé définies dans le CSP, au sein de l’établissement. Il s’agit des actes médicaux de prévention, de diagnostic ou de soins.
- s’il s’agit d’une faute de service, le médecin n’est pas personnellement responsable, mais l’hôpital devant les tribunaux administratifs (erreurs techniques, retard ou erreur de diagnostic, défaut d’information sur un risque médical connu, erreur de choix thérapeutique (traitements et soins courants)
2 - Faute de l’établissement (faute caractérisée et spécifique) dans l’organisation et le fonctionnement du service public hospitalier (par exemple, défaut de surveillance, par exemple d’un patient agitée ou déséquilibré, de non-hospitalisation quand surnombre d’hospitalisés, un défaut de présence médicale, un défaut de compétence médicale... ).
De manière générale, le juge vérifie que «compte tenu des moyens techniques et du personnel médical dont dispose l’établissement, le malade a reçu tous les soins qui pouvaient être pratiqués et a été suivi par des médecins qualifiés pour traiter son affection » (Conseil d’état, 23/04/1997).
2° La responsabilité sans (rapporter la preuve d’une) faute maintenue dans 3 cas : des produits médicaux défectueux, des dommages résultant d’infections nosocomiales, à l’égard des biens des personnes accueillies (pertes matérielles, vol, perte, détérioration)).
RESPONSABILITE INDIVIDUELLE DU MEDECIN, UN PROFESSIONNEL DE SANTÉ ET DE TOUT AGENT PUBLIC
Dans le cas de « faute personnelle détachable du service » (i.e. effectuer lors du service mais détachable de l’exercice des fonctions, c’est-à-dire soit une faute intentionnelle ou d’une particulière gravité, toujours grave, comme par exemple, la maltraitance à l’égard des patients, le refus du médecin de garde de se déplacer, exercice illégal de la médecine dans le cadre d’un glissement de tâches pour l’infirmère, ...)
- peut-être engagé au niveau de la procédure civile (faute personnelle détachable du service) ou pénale ( l’infraction doit être réprimée par le code pénal ou le CSP).
- Au niveau pénal, elle est engagée dans le cas d’une infraction non intentionnelle (homicide, blessures involontaires par faut d’imprudence, de négligence, d’inattention... ), d’une mise en danger de la vie d’autrui, d’une non assistance à personne en péril (abstention volontaire), d’une violation du secret professionnel
2.3. Le principe de protection des fonctionnaires
Les fautes commises par les agents dans l’exercice de leurs fonctions engagent la responsabilité de l’établissement. Autrement dit, c’est la responsabilité de l’hôpital qui sera engagée, en vertu de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983, dans la mesure où c’est l’organisation et le fonctionnement du service public hospitalier « dans son ensemble » qui est remis en cause.
Dans cette mesure, c’est la responsabilité de l’établissement hospitalier qui sera engagée du fait de la faute de ses préposés hormis l’hypothèse de la faute détachable.
L’article 11 de la loi suscitée dispose à ce titre que « les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. Lorsqu’un fonctionnaire a été poursuivi pour faute de service et que le conflit d’attribution n’a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute détachable de l’exercice de ses fonctions n’est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui (…)»
QUESTIONS :
- Quelles sont les bases juridiques et règlementaires et qui semblent être en contradiction avec les textes législatifs et règlementaires existants portant sur les relations hiérarchiques suivantes :
- de la « désignation » (et non délégation) des pouvoirs hiérarchiques du chef de pôle ou son représentant en tant que supérieurs hiérarchiques du psychologue (lors l’entretien d’évaluation)
- de la délégation du chef de pôle, reçue par le directeur, délégué à nouveau, juridiquement difficilement pensable
- de l’implication d’un simple praticien hospitalier quant à la responsabilité professionnelle qu’il prend en charge par rapport au travail du psychologue, de son accord ou autorisation exigés quant au choix des modes d’intervention clinique du psychologue et l’accès direct au patient, ainsi que la responsabilité professionnelle et l’autorité exercée sur l’autonomie d’exercice du psychologue
- in extenso et en dehors des prérogatives du fonctionnement du service, quels sont les compétences d’un médecin à évaluer, autoriser, se rendre professionnellement responsable de l’exercice du psychologue, tant au niveau de la fonction clinique que de la fonction formation-information-recherche
Dans la fonction publique, l'autorité hiérarchique est détenue par celui ou celle qui a le pouvoir de nomination, d’évaluation, de notation – d'où l'impossibilité de délégation quant à la gestion des carrières, après avis des instances de représentations du personnel (la nomination, la titularisation, les avancements d'échelons et de grades, la notation, les dispositions disciplinaires, la mobilité dans le sens de la mise en disponibilité, du détachement, etc.), à l'exception de la délégation de cette gestion au DRH.
L'autorité fonctionnelle est le pouvoir dont sont investies certaines personnes à raison de la fonction qu’elles remplissent ou qu’elles exercent dans un cadre institutionnel déterminé, permettant le « bon fonctionnement », du pôle par exemple. Elle concerne notamment la gestion des plannings, les formations, l'évaluation, les affectations internes. Le psychologue est pour l'instant sous l'autorité fonctionnelle du chef de pôle quant à la gestion des plannings (comme tout membre du pôle), mais il existe des synonymes hiérarchiques dans cette relation fonctionnelle, comme dans le cadre de l'entretien d'évaluation (l' « avis » sur la notation annuelle, prévu dans la circulaire de 1992), le recrutement des psychologues contractuels, l'affectation interne au pôle.
La délégation vient du latin « délégatio ». C’est une procuration, un mandat pour agir à la place de quelqu’un. C’est un acte juridique.
Traditionnellement, il existe deux formes de délégation : la délégation de pouvoir et la délégation de signature.
La délégation de pouvoir est accordée non pas à une autorité nommément désignée mais à une autorité détentrice d'une fonction. Elle s'attache donc à la fonction et non à la personne, ce qui explique que la délégation reste valable si le délégant ou si le délégataire change.
Dans l'ordre inverse, la délégation de signature de délégant rend la délégation caduque. Pour soulager son supérieur hiérarchique d'une surcharge de travail, le délégataire ne fait qu'exercer pour le compte et au nom du délégant certaines de ses attributions.
Dans l'hypothèse où il s'agit d'une délégation de signature, les questions suivantes doivent normalement être exclues du champ des attributions du pôle :
1. - Les décisions requérant la consultation d'une instance d'établissement (CME, CTE, CAP, etc.).
2. - Les décisions relatives à la politique générale des ressources humaines au niveau des titulaires tout au moins (recrutements, organisation, affectations, etc.).
3. - Les décisions relatives aux marchés publics.
L'autorité, fut-elle hiérarchique, fonctionnelle ou déléguée, a néanmoins des effets en termes de pouvoir (faculté d’agir) et d’autorité au propre sens du terme (faculté de fonder l’action de quelqu'un d’autre). Ainsi, chaque catégorie professionnelle se définit par rapport à la catégorie supérieure (et non l’inverse). Elle se trouve non seulement dans une relation de subordination, mais aussi d’inclusion. Ces catégories ne sont pas leur propre référent : c’est la catégorie supérieure qui joue ce rôle. C’est ainsi, par exemple, que le psychologue peut glisser dans une inclusion dans le médical.
En termes sociologiques, l'ensemble des dispositions relatives à l'autorité instaure et permet une « régulation sociale ». Dans le cas du psychologue et à l'heure actuelle, il s'agit d'une « régulation conjointe » qui est un compromis entre une régulation de contrôle et une régulation autonome.
Le concept sociologique des « zones d'autonomie » désigne des « zones d'incertitude » pour l'organisation, d'où la volonté de les cadrer au plus près possible. Pour l'institution, dans sa relation au psychologue, ces « zones d'incertitude » concernent ce qui relève d'une part de l'autorité hiérarchique du directeur (comme par exemple la gestion de leur formation tout au long de la vie, déléguée à la DRH), et d'autre part de l'autonomie professionnelle (comme par exemple, la gestion de la fonction FIR, la référence au Code de déontologie, parfois en désaccord avec les dispositions légales, comme le secret professionnel, l'évaluation de ses propres pratiques professionnelles ...).
Question écrite n° 03330 de M. Bruno Sido (Haute-Marne - UMP)
publiée dans le JO Sénat du 24/10/2002 - page 2448
M. Bruno Sido appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur la définition du rôle des psychologues hospitaliers, et de leur place par rapport aux psychiatres. En effet, selon le décret n° 91-129 du 31 janvier 1991 relatif au statut des psychologues, ceux-ci " contribuent à la détermination, à l'indication et à la réalisation d'actions préventives, curatives assurées par les établissements et collaborent à leurs projets thérapeutiques ou éducatifs tant sur le plan individuel qu'institutionnel. Ils entreprennent, suscitent ou participent à tous travaux, recherches ou formations que nécessitent l'élaboration, la réalisation et l'évaluation de leur action ". Or, il serait souhaitable d'obtenir des précisions sur les questions suivantes : un psychologue hospitalier est-il habilité à rencontrer en primo-consultation un patient, sans que celui-ci ait été adressé par un médecin psychiatre - après consultation de ce dernier - et sans que cela engage sa responsabilité si le patient met enjeu l'absence de consultation médicale préalable ? Un psychologue hospitalier peut-il assurer une direction de cure sous sa seule responsabilité sans agir sous le contrôle d'un psychiatre ou d'un médecin hospitalier compétent ? Plus fondamentalement, la question de fond est celle du degré d'autonomie du psychologue hospitalier dans l'exercice de ses fonctions, particulièrement en psychiatrie. Le problème se pose avec d'autant plus d'acuité que le nombre de psychiatres décroît, qu'un certain nombre de postes restent non pourvus et qu'il faut donc trouver des palliatifs pour continuer à assurer la prise en charge des patients sans rupture de celle-ci ou dans des délais acceptables. Il lui demande par conséquent de bien vouloir lui donner les
précisions attendues et lui indiquer sa position sur le sujet.
Réponse du Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées publiée dans le JO Sénat du 10/04/2003 - page 1258
Le décret n° 91-129 du 31 janvier 1991 relatif au statut des psychologues définit les missions des psychologues : " ils contribuent à la détermination, à l'indication et à la réalisation d'actions préventives, curatives assurées par les établissements et collaborent à leurs projets thérapeutiques ou éducatifs tant sur le plan individuel qu'institutionnel. Ils entreprennent, suscitent ou participent à tous les travaux, recherches ou formations que nécessitent l'élaboration, la réalisation et l'évaluation de leur action ". Les dispositions figurant dans ce décret impliquent la compétence des psychologues, d'une part, pour repérer les troubles mentaux et susciter ou soutenir, si besoin, l'engagement dans une démarche de soins appropriés des personnes dont ils assurent le suivi psychologique et d'autre part, pour contribuer aux soins en établissant des diagnostics de personnalité ou en conduisant des prises en charge psychothérapiques. Dans le cadre de protocoles de fonctionnement et d'organisation des secteurs de psychiatrie, la compétence du psychologue autorise le développement de son accès direct par les nouveaux patients lors de demandes de prise en charge psychologique. Les protocoles précités permettent de garantir les responsabilités réciproques des psychiatres et des psychologues du secteur autour des besoins de chaque patient.
Les différentes interventions des psychologues doivent s'intégrer dans le cadre du travail global du secteur et donner lieu à des temps de synthèse et d'analyse en commun des pratiques ou du service avec l'équipe pluriprofessionnelle.
Source : Site du Sénat : http://www.senat.fr/questions/base/2002/qSEQ021003330.html