Docteur Guy Baillon
Psychiatre des Hôpitaux août 2006
« Pan-Hellenic Congress : Psychiatric Reformation in Europe and Greece-History, Theory and Action, April 7-9, 2006”
Docteur Guy Baillon, Psychiatre des Hôpitaux, Bondy près de Paris : “Are they any lessons, negatives and positives, you could get from French ‘Politique de Secteur’, 1960-2006”
En tant que simple psychiatre médecin chef de secteur dans notre service public, j’ai eu la chance de mener toute ma carrière dans le même secteur (14) du même département (93, la Seine St Denis, au nord de Paris) où j’ai participé à une évolution passionnante. En effet avec la même équipe nous avons pu passer en 30 ans de l’asile à une psychiatrie de secteur totalement relocalisée dans nos villes hors tout hôpital ; le fait d’avoir vécu les deux dernières années de ma carrière dans ce nouveau cadre m’a apporté tant de joie que j’ai eu le désir de témoigner ensuite de la richesse qu’a été ‘la psychiatrie de secteur’ dans cette épopée.
J’ai été invité à faire devant vous un ‘vrai’ bilan de la psychiatrie de secteur en France. Il ne saurait être qu’historique, et ce sera un simple survol. Sachez que malgré la multiplication des ‘rapports officiels’ sur la psychiatrie depuis 20 ans, près d’une dizaine, ce bilan ‘historique’ n’est toujours pas fait. Si l’Etat freine à le faire, ne serait ce pas parce qu’il mettrait en évidence la pertinence de cette politique, alors que l’aile libérale française, majoritaire actuellement, aimerait s’en débarrasser ?… tendancieux n’est ce pas !
« Des idées, des hommes, des institutions et des lois ».
La raison en est la force que contre vents et marées cette politique s’est enracinée sur le terrain, alors que ni l’Etat, ni les lobbies au pouvoir n’ont manifestement pris toutes les mesures qui auraient permis de l’appliquer complètement. Dès le départ il y a eu un ‘décalage’ entre le projet de la psychiatrie de secteur et les moyens qui lui sont accordés, et ce décalage se retrouve tout au long son histoire.
Nous voudrions ici, pour éclairer cette question, dégager les points suivants :
I -- dans une première partie aborder :
1-la naissance de la psychiatrie de secteur et ses objectifs
2-son hypothèse et ses principes
3-les premiers avatars de sa réalisation jusqu’en 1990
II --ensuite dans une seconde partie :
4-la période, dure, 1990-2000
5-ce qui permettra de mettre en évidence le décalage entre le but et les résultats
6-et donc peut être …d’en tirer quelques leçons.
Première partie. Naissance de la politique de secteur :
Le projet de cette politique est né dans les suites de la dernière guerre : avec le constat de l’abandon des malades dans les anciens asiles et la mort de faim de plus de 40.000 d’entre eux, l’expérience des camps de concentration et la comparaison troublante entre le fonctionnement social de chacun de ces deux espaces (les Kapos et les ‘bons malades’). Mais aussi après la douloureuse expérience de la séparation, de l’éloignement des patients dans les asiles, de la concentration des soins dans ces espaces de bannissement ; l’espoir de soigner autrement était né de diverses façons en dehors des hôpitaux depuis les années 1930. La volonté des promoteurs d’une nouvelle politique était de montrer que l’on devait soigner les troubles psychiques en s’appuyant sur l’environnement humain des personnes malades, tout en précisant, que la référence forte était la Cité, c’est à dire un espace créé par des hommes liés par le ciment d’une histoire commune (Bonnafé, puis Hochmann).
Simultanément, un enjeu fondamental s’est engagé dans l’immédiat après guerre, 1945-1950, (avant donc la première formulation de la psychiatrie de secteur) avec l’instauration de la Sécurité Sociale (la Sécu). Elle a permis le financement national de tous les hôpitaux (et parmi eux les hôpitaux psychiatriques, puisque les anciens asiles avaient pris la dénomination d’hôpital psychiatrique en 1937) exprimant ainsi une solidarité nationale à l’égard de tous les malades, la gratuité des soins psychiatriques dans le service public étant totale.
Le début de cette ‘révolution’ n’a été marqué que par la publication de deux simples circulaires ministérielles adressées aux Préfets les 14 et 15 mars 1960. La première posait les principes de cette politique nouvelle, la seconde voulait faire face à l’horreur du moment : l’inhumanité des hôpitaux psychiatriques. Mais elles n’étaient appuyées par aucun moyen financier. Cela explique qu’elles n’ont presque pas eu d’effet concret. Cependant elles ont contribué fortement à l’éveil des soignants, si bien qu’avec la mobilisation populaire suivante, celle de 1968, le terrain était près pour amorcer un vrai changement ; un petit groupe d’hommes (les tenant d’un projet « désaliéniste », avec surtout Lucien Bonnafé, Daumezon, Mignot, et Mamelet, Bailly-Salin, Ayme, Chaigneau, Misés, Paumelle, Hochmann…, inspiré aussi par le courant contemporain de la psychothérapie institutionnelle, avec Tosquelles, Oury, Torrubia…et d’autres, différents mais convergents Sivadon…), allait s’appuyer sur une forte mobilisation professionnelle autour de l’élaboration pendant 3 ans de débats du « Livre Blanc de la Psychiatrie » 1965-67 avec la société de ‘L’Evolution Psychiatrique’. Une nouvelle circulaire aux Préfets (14 mars 1972) lançait l’installation de cette politique en nommant sur l’ensemble du territoire les « médecins chefs de secteur » nécessaires, désignés comme étant la cheville ouvrière, ayant la responsabilité de veiller à l’élaboration des soins, de la prévention et de la post cure d’une population limitée à environ 60 à 70.000 habitants.
Cependant les obstacles à l’application de cette politique restaient considérables, les hôpitaux étaient énormes et à l’extérieur des villes. Même si chaque équipe de secteur était rattachée à un hôpital, chacune avait la quasi totalité de ses moyens concentrés dans l’hôpital. Les directeurs, n’étant chargés d’aucune responsabilité dans l’application de cette politique, y étaient le plus souvent indifférents ; pour développer des soins hors de l’hôpital les psychiatres étaient obligés de convaincre eux mêmes les élus et responsables départementaux, seuls à même de décider leur financement en engageant une participation du département. Beaucoup acceptèrent l’enjeu, mais la cohésion était laborieuse.
Cette évolution stagnante sur le plan des réalisations contrastait avec une mobilisation de plus en plus grande (avec le SPH, le Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux) et une augmentation de leur nombre (ce SPH fut aussi de 1964 à 1984 une ‘haute école de santé publique’ pour les psychiatres de ces générations, ce qui a gravement manqué par la suite).
Hypothèse clinique de la psychiatrie de secteur :
Avant de décrire la période 1981-1990 reprécisons d’abord ‘l’hypothèse clinique’ base de la politique de secteur. C’est essentiel, car une transmission fâcheuse s’est faite rapidement, la réduisant à sa traduction administrative : pour celle ci la politique de secteur serait seulement un découpage comptable de population, celui ci s’est souvent réalisé en divisant villes, et banlieues sans tenir compte des liens de citoyenneté.
Nos collègues, psychiatres fondateurs, étaient partis, eux, de constats préalables précis :
-les troubles psychiques graves ne sont pas ‘ponctuels’, mais se déroulent tout au long de la vie, et de façon variable, de plus leur évolution n’est pas systématiquement péjorative comme l’avait laissé croire la tradition ‘aliéniste’,
-en même temps et sous l’influence de la plupart des pathologies l’insertion sociale de tout patient est altérée, d’où la rupture fréquente du patient avec son histoire comme avec son environnement, qui aboutit même à une rupture profonde de tous ses liens sociaux,
-face à ces évolutions l’hôpital avait montré sa carence pour reconstruire ces liens, en raison de son contexte de séparation, d’isolement, d’éloignement, et de sa concentration inhumaine,
-en même temps les soins de proximité paraissaient de plus en plus réalisables et efficaces ; il était évident qu’ils nécessitaient l’implication d’une ‘équipe pluridisciplinaire’, en particulier pour les psychotiques dont la vie psychique est morcelée, si vite classés comme ‘chroniques’.
Le projet de la politique de secteur est de rechercher à construire des outils de soin « à dimension humaine », la référence étant l’homme, à décliner pour tout et de faire porter le travail de la psychiatrie sur les liens sociaux de tout homme. Ce travail sur les liens n’était pas éducatif, ni comportemental, mais basé sur un travail psychique individuel et collectif. Une seule équipe de soin, pluridisciplinaire, avait la mission d’assurer soins, prévention et postcure pour tous les membres d’une même population de taille modeste (70.000h).
Petite contradiction, la distinction, qui se justifiait pour respecter la fragilité des enfants et adolescents en les suivant ailleurs qu’avec les adultes (ainsi une équipe infanto-juvénile est créée pour trois équipes de psychiatrie générale, 200.000h), a créé une séparation qui s’est avérée ensuite trop lourde entre les acteurs de ces deux équipes sur le terrain.
Les trois principes « fondamentaux » de la psychiatrie de secteur ont bien été cliniques :
-la continuité des soins, concerne la totalité des troubles psychiques, centre le soin autour du domicile ; elle justifie qu’une élaboration clinique essentielle soit ‘distillée’ pour la réaliser,
-l’appui des soins sur le contexte humain, l’environnement relationnel de chaque patient, remplaçant le dogme de la séparation ; elle était à défricher totalement car la psychiatrie avait jusqu’alors établi des ‘clivages’ entre le patient et le reste de la société ; c’est le travail sur le tissu relationnel qui commence par l’appui sur la famille, et se poursuit sur l’entourage,
-l’accessibilité des soins, la proximité entre espaces de soin et lieu de vie des patients associée à la disponibilité des soignants, met fin à l’éloignement des hôpitaux psychiatriques.
1981-1990 –Période d’officialisation de la psychiatrie de secteur :
-1981: la gauche arrive au pouvoir (notons que chacun des trois mouvements ‘populaires’ 1945, 1968, 1981 a été contemporain d’un réexamen de la politique de santé mentale en France). Jack Ralite, ministre de la santé, communiste, prononce un discours mobilisateur à Rouen et demande à notre collègue Jean Demay de rédiger un rapport sur l’avenir de la psychiatrie. Ce texte, bref mais d’une belle écriture, et rédigé avec du ‘souffle’, propose une psychiatrie qui privilégie ‘l’homme’ et donne les bases de la réflexion clinique qui l’inspire. Il ne demande qu’une seule mesure concrète : la création pour un à trois secteurs d’un « Etablissement Public de Secteur » remplaçant l’énorme administration de l’hôpital et du département. Vous savez que lorsque l’on veut mener à bien une psychothérapie d’un tout jeune enfant, on commence par s’adresser à l’enfant en se mettant à son niveau, près du sol. Ainsi l’administration pour être adaptée se doit de se mettre au même niveau que le travail clinique, celui d’un seul secteur, et non d’une grande concentration hospitalière. L’état de grâce de 1981 ne dure pas, les socialistes écartent les ministres communistes et leurs propositions. Le rapport Demay est censuré, mais provoque en 1983 la reprise par l’Etat de l’étude des dispositions nécessaires à l’application de la politique de secteur : une Commission des Maladies Mentales est constituée au ministère, l’Etat sous son impulsion va corriger son indifférence et prendre un train de mesures installant fermement cette politique :
-en 1984 au lieu de deux financeurs (Sécu-hôpital et Département-secteur), la Sécu finance seule, chaque équipe de secteur trouve l’unité nécessaire à son fonctionnement,
-en 1985 l’Etat, sachant qu’il faut localement un responsable, donne cette mission aux directeurs d’hôpitaux dans une loi qui officialise, enfin après 25 ans, la politique de secteur,
-en 1986 la Sécurité Sociale reconnaît la valeur thérapeutique des nouvelles formes de soin données dans les nouvelles structures (décret du 14 mars 1986 déclinant les 12 structures de soin ‘homologuées’, 6 sans hébergement, et 6 avec) : «(sans) Centre Médico-Psychologique, hôpital de jour, Centre d’Accueil Permanent, atelier protégé, Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel, famille d’accueil thérapeutique, puis (avec) Hôpital temps plein, hôpital de nuit, foyer, Centre de Crise, hospitalisation à domicile, appartement thérapeutique ».
Ces mesures ont des résultats considérables ; elles donnent corps d’abord à la délimitation des secteurs sur la totalité de la France : 830 ; ainsi seront créées en 20 ans 830 équipes de psychiatrie générale, 320 infanto-juvéniles et 20 pénitentiaires, au total 1170 équipes. Soulignons que bien que lente, inégale, cette application a couvert la totalité du territoire français et donné partout une armature de service public ayant une force considérable :
-pour chaque équipe seront créées (ceci varie localement) plusieurs structures de soin,
-le nombre de patients suivis chaque année par équipe double (passe de 600 à 1200 ),
-le nombre des hospitalisations va diminuer, ainsi que le nombre de lits occupés,
-l’amélioration de la tolérance de la psychiatrie en ville sera régulière, les réactions des médias ne seront plus toutes négatives.
Mais, … Vous m’obligez aujourd’hui, en m’invitant à faire ce bilan, à parler aussi de ses défauts ! Ils existent. En fait ils ont commencé très tôt et que leurs effets vont s’aggraver avec les évènements ultérieurs. Certes les responsabilités sont multiples. Les solutions choisies vont se pervertir parce qu’elles ne seront « pas accompagnées » par l’Etat ; l’Etat va se retirer de son rôle de régulateur dès 1990 :
-de même le désengagement des élus départementaux écartés des décisions financières entrainera une perte d’intérêt envers la psychiatrie,
-la désignation du Directeur d’hôpital comme décideur va centrer tout le dispositif décisionnel non sur le secteur, (les circulaires avaient précisé que le pivot devait être le CMP), mais sur l’hôpital : c’est le début de l’hospitalocentrisme qui ne fait que se renforcer,
-l’arrêté du 14 mars 1986, qui avait permis la reconnaissance par la Sécu des activités sur le secteur comme étant des soins, aurait du être renouvelé tous les trois ans. Il ne le sera jamais. Ceci va entrainer un blocage de l’imagination des soignants pour renouveler leurs soins, et une perversion de cette politique dans beaucoup d’équipes : en effet elle facilite le mouvement vers le développement de prétendues ‘spécialisations’ qui en fait ne sont que des tentatives pour flatter la notoriété des psychiatres entre eux. Sous prétexte d’économies elle va favoriser l’écrémage de certaines pathologies ; des patients sont envoyés dans des « intersecteurs » parce qu’ils sont porteurs d’un symptôme (sommeil, anorexie, dépression, etc.) ; les patients de plusieurs secteurs adressés à une équipe d’intersecteur sont ainsi éloignés de leur environnement au profit d’une ‘technique’ de soin limitée ; ceci aboutit à la dégradation de la psychiatrie ‘générale’, car faire face à toutes les pathologies d’une même population était le fondement de la psychiatrie de secteur.
Tout cet ensemble conforte l’évolution vers l’hospitalocentrisme.
Nous ne sommes qu’en 1990 : à cette époque les soignants, encore optimistes et motivés, n’ont pas encore compris que le fait de ne pas avoir pu s’attaquer frontalement (mais le rapport de force politique était totalement en leur défaveur) à l’énorme poids de « l’hôpital » allait avoir des conséquences irrémédiables.
Il aurait fallu d’emblée en effet, et simultanément au déploiement des soignants dans le tissu du secteur, que soient prises les deux décisions suivantes :
-1-une planification de tous les secteurs avec l’octroi de moyens humains équivalents (dès le départ des inégalités considérables entre équipes voisines et entre départements ont été installées sur la base précédente de l’inégalité des asiles)
-2-l’installation des lits hospitaliers dans la ville du secteur (20 lits par équipe suffisent). La persistance des grosses concentrations hospitalières, son résultat étant l’hospitalocentrisme,
vont redonner un poids de plus en plus lourd à la dynamique des soins : elle reste centrée sur l’hôpital et privilégie l’hospitalisation …
Ces deux mesures n’ont pas été prises. De plus dès 1984 les psychiatres vont diminuer leur poids politique, car en raison de leur nombre croissant, ils vont faire éclater leur syndicat unique en 4 à 5 syndicats, ceux ci ne défendront plus d’une seule voix une politique d’ensemble sur la santé mentale, trop fascinés par leur clientélisme.
Ainsi le refus de prendre une position radicale contre l’inhumain de l’hôpital a cherché à être remplacé par une pluie de textes officiels, trop nombreux, mélangeant la logique du soin et la logique gestionnaire ; le résultat dans les équipes a été la confusion des rôles et le blocage de l’imagination des soignants, alors que celle ci est une nécessité de la pratique psychiatrique.
IIème partie
Nous avons distingué dans la première partie le début de la psychiatrie de secteur :
-les principes, tirés de son origine historique,
-les avatars de son application dépendant du contexte : les hommes, les institutions, les lois.
Nous allons maintenant résumer l’étape ultérieure de sa mise en place, en soulignant que la psychiatrie française s’est donnée dans son objectif de réforme deux tâches simultanées, dont les lignes de force sont en fait opposées, d’où l’aspect discordant du résultat observé :
-d’une part se réalise le développement de formes et de structures de soin nouvelles dans le tissu social de chaque secteur (en suivant les règlements officiels décidés en 1985-6) où la dimension humaine est recherchée pour chacune,
-d’autre part l’effort d’humanisation des services hospitaliers a comme résultat de renforcer la psychiatrie que l’on voulait remplacer ; certes le souci humain est le même, mais ici régi par des règles administratives qui vont en pervertir le résultat, car y priment des règles de gestion anonymes et distantes du terrain, où la dimension humaine est constamment malmenée, par le monstre économique que continue à être l’hôpital.
La décennie 1990 – 2000 :
Centrons le bilan général sur les années 2000-2006, avec tout d’abord quelques chiffres :
Pour le seul service public et donc les 830 secteurs (830 équipes de psychiatrie générale, 350 de psychiatrie infanto-juvénile, et 20 pénitentiaires) :
-le nombre des psychiatres a augmenté de 800 vers 1965, à 4000 en 2001, (auxquels s’ajoutent 9000 psychiatres dans le privé et l’associatif, ce qui place la France au 2ème rang parmi les pays dont la densité de psychiatres par habitant est la plus forte), mais 800 postes du public ne sont pas pourvus aujourd’hui parce que… les psychiatres choisissent de préférence le privé ! (ces carences, 1 poste vide sur 5, jamais comblées par l’administration aboutissent à des situations catastrophiques du fait de la répartition très inégale dans le pays),
-le nombre d’infirmiers du service public de psychiatrie aurait un peu diminué autour de 60.000, mais surtout leur statut a changé. Ils ne sont plus ‘infirmiers psychiatriques’, mais ‘infirmiers diplômés d’Etat’, donc sans distinction avec ceux qui travaillent en médecine, chirurgie, obstétrique…, de ce fait ils ont perdu leur identité et il leur devient très difficile de s’identifier à la spécificité de la psychiatrie, et de la défendre seule ; en même temps :
-le nombre de lits a diminué de 110.000 à 60.000,
-les structures de soin se sont multipliées, mais très inégalement, environ : 1500 à 2000 CMP, 600 à 800 hôpitaux de jour, 1000 à 2000 CATTP, …
-le nombre de patients suivis par an a augmenté pour arriver à environ 1,2 million,
-chaque équipe de secteur suit environ 1200 patients par an en moyenne (la file active désigne le nombre de patients vus par an, quels que soient le nombre de séjours et leur durée),
-en sachant que 20% d’entre eux ont eu un temps d’hospitalisation temps plein et que 80% ont été suivis exclusivement en ambulatoire.
Une amélioration considérable…et pourtant en 2002 les psychiatres français se réunissent bruyamment à Montpellier pour pleurer sur leur sort en disant qu’ils manquent de moyens…Nous avons vu que nous sommes le 2ème pays le plus riche !
Une telle attitude est aux yeux des autres pays ‘inacceptable’. Elle a une explication : les moyens sont en France très mal répartis (Paris, les grandes villes, la côte sont très bien pourvus, et le privé est choisi de préférence au public), du coup la situation locale de certaines équipes est désastreuse. Le paradoxe est que les équipes bien loties se plaignent aussi.
Ainsi l’inégalité des répartitions et des évolutions locales entraine des différences considérables sur le terrain, ce qui montre que tout bilan général qui se contente d’une ‘moyenne’ constitue une falsification de la réalité, en effet :
-un grand nombre d’équipes, rencontrent une autre difficulté : elles sont déchirées entre ces deux pôles de travail aux règles opposées, -le travail dans le secteur, -et le travail à l’hôpital (le but de la psychiatrie de secteur c’était une vision globale des soins, une cohésion de fonctionnement, aboutissant à une vraie continuité des soins), et se sont trouvées épuisées, bloquées, en très grand désarroi,
-d’autres équipes au contraire, parce qu’elles ont pu construire une continuité de réflexion, ont pu mener plus loin la réalisation de cette politique ; quelques unes ont quitté en totalité et définitivement l’ancien hôpital psychiatrique, sans pour autant s’enfermer dans un hôpital général (celles qui ont émigré dans un hôpital général se sont le plus souvent retrouvées dans un autre ghetto tout en perdant un à deux tiers de leurs moyens humains) et en installant leurs lits dans des immeubles neufs de la ville même. Ainsi en Seine St Denis, le 93, au nord est de Paris, à Neuilly s Marne dans l’hôpital psychiatrique de Ville-Evrard (asile créé en 1868 et ayant rassemblé 2000 patients hommes, face à l’asile de Maison-Blanche et ses 2000 femmes réservé à Paris) sont rattachées 17 équipes de secteur pour un million d’habitants ; en 2000, 8 de ces 17 équipes ont installé chacune leurs 20 lits (elles en avaient 100 à 160 avant), réparties sur trois sites en ville, hors hôpital : ces 8 équipes y réalisent enfin une psychiatrie humaine, toute simple, sans avoir besoin de mesures de contrôle ni de sécurité ; les soins y associent les habitants des villes, lesquels vont et viennent simplement dans cet espace de soin ; ces équipes s’appuient sur les ressources de l’entourage, en effet les habitants l’investissent eux mêmes comme l’un des espaces de leur ville ; la psychiatrie n’est plus stigmatisée par la séparation, ni par l’exclusion. J’ai eu la joie d’y vivre les deux dernières années de ma carrière et j’ai été émerveillé du résultat. De plus ces équipes ont souvent décidé de se montrer attentives à la mise en place « de centres d’accueil » : grâce à quelques soignants qui dans chaque équipe de secteur ont la mission de faciliter le lien et, quand nécessaire, le passage entre la communauté sociale et le soin ; ils veillent là à l’élaboration des demandes de soin et au choix des modalités d’entrée dans le soin les mieux adaptées, par ce travail précis ‘de proximité’. Nous avions fondé dès le début en 1982 de grands espoirs dans la réalisation de ces ‘Accueils’ au point de penser qu’ils se multiplieraient en France, en fait il y en a 5 dans le 93, mais ils ne sont que 40 en France. Notre équipe a beaucoup travaillé ce point nodal du soin, ces moments où l’on peut prévenir les ‘urgences’ et où l’on écarte le non besoin de soin, et où l’on améliore les indications de soin ce qui ainsi diminue le besoin d’hospitalisation. Nous pensons que le résultat de ce travail d’accueil est passionnant (« Les urgences de la folie » de Guy Baillon chez Gaétan Morin éditeur, 1998).
Cette diversité de résultats rend très difficile la lecture de notre service public par l’opinion comme par les tutelles, et comme l’idéal du service public est l’égalité des droits, cela… participe plutôt à une perte de crédit de la politique de secteur dans l’opinion !
1990 : D’autant qu’après 1990 les difficultés vont s’amonceler. Il y a là deux responsables :
-l’Etat : ferme en 1990 le bureau de la psychiatrie au ministère de la santé, initiateur des textes de 1983-6, il se désintéresse de la psychiatrie de service public. Celle ci, non accompagnée, va évoluer, mais, dans l’anarchie, sous le seul effet des acteurs locaux,
-les psychiatres dispersés en 4 à 5 syndicats dès 1984 seront trop pris par leurs soucis corporatifs et saisis par le seul individualisme vont perdre toute influence, ils ne peuvent plus élaborer une politique de santé cohérente.
Ces difficultés sont malheureusement aggravées, par une hémorragie persistante des psychiatres quittant le service public pour aller dans le privé (ils sont 3200 pour 4000 postes publics alors que 10.000 autres sont dans le privé) et par la disparition du diplôme d’infirmier psychiatrique. Les professionnels sont de moins en moins nombreux pour défendre les principes fondamentaux de la psychiatrie de secteur : « la continuité des soins, l’appui sur le contexte relationnel, l’accessibilité des soins », et sa réalisation concrète.
Ensuite l’Etat, en se centrant sur la médecine, va prendre des mesures officielles dont l’esprit et le résultat sont en totale opposition avec la psychiatrie de secteur :
-sous prétexte d’‘humaniser’ la vieille loi de 1838 sur l’internement, sa réforme de juin 1990, bloque le déploiement des soignants dans le tissu social en renforçant les seules urgences des hôpitaux généraux ; elle a rendu très facile l’enfermement des patients pour les motifs les plus simples (un délire en salle d’urgence est interprété comme refus de soin, un manque de temps des soignants suffit à parler de refus de soin, et ils entrainent une hospitalisation sous contrainte) ; cette loi légitime l’arbitraire, depuis, les hospitalisations augmentent sans cesse,
-l’Etat a incité à rassembler les soins en ciblant un seul symptôme (urgence, sommeil, dépression, troubles alimentaires, personnes âgées, suicide, etc…) en ‘structures de soins’ dites ‘intersectorielles’, à distance du secteur, écartant ainsi l’appui sur le contexte relationnel, mettant en miettes la psychiatrie générale, fondement de la psychiatrie de secteur, pour favoriser de prétendues ‘spécialisations’,
-il a multiplié les formes de contrôles et de comptabilité, calquées sur le modèle médical, non adaptées à la psychiatrie, ni aux soins dans le secteur, toutes centrées sur l’hôpital (PMSI, accréditation, qualité, hôpital 2007, gouvernance), et étouffant les équipes qui au contraire ont besoin d’avoir l’esprit assez libre pour développer un travail nouveau, à inventer,
--le résultat global est l’hospitalocentrisme (l’hôpital est la préoccupation centrale, les hospitalisations augmentent, le directeur et son conseil d’administration décident de tout à partir de l’hôpital et de sa logique surdimensionnée et inhumaine, au lieu de se centrer sur les besoins propres à chaque population de secteur) ; donc se produit une évolution opposée à la politique de secteur. Ses conséquences sont cruelles : le besoin de sécurité est croissant dans les énormes hôpitaux, sans que l’administration comprenne que ces grands espaces sont générateurs de pertes de liens, d’anonymat, ‘d’inhumanité’, car trop ‘abstraits’, trop grands, dans cette ambiance la peur surgit à chaque instant…Au contraire, dans les lieux de vie du patient, la proximité, la disponibilité des soignants permettent à tout soin de s’appuyer sur les relations humaines du patient constamment restaurées.
Dans le même temps, profitant de cette situation, le secteur privé n’exploitant que de petites structures à taille humaine, avec le niveau relationnel très fort des classes aisées a beau jeu de dire que ses soins donnent de meilleurs résultats que le service public. Ainsi se construit progressivement aux dépens du service public une psychiatrie à deux vitesses.
Alors le résultat final ? vous vous attendez à ce que je convienne que c’est une catastrophe : en raison de ces obstacles, de ces attaques, de ces abandons successifs, venant de l’intérieur comme de l’extérieur du service public ? La psychiatrie de secteur serait elle détruite ?
Eh bien non ! Je peux témoigner devant vous que LA PSYCHIATRIE DE SECTEUR SURVIT, ELLE « RESISTE » !
Même le ministère, la cite tout le temps comme 'sa politique' dans tous les textes officiels sur la santé. De plus sur le terrain la quasi majorité des soignants (sauf la plupart de nos universitaires fascinés par les exigences de la notoriété internationale qui ne prend jamais en considération la psychiatrie de secteur française, car elle serait 'non scientifique', aussi se limitent-ils à la biochimie et au comportementalisme), se réfèrent à la psychiatrie de secteur et s'y montrent attachés, malgré leur désarroi !
Conclusion :
Quelle est donc la raison de cette résistance ? Pourquoi est elle si forte ?
Source : Site SERPSY
Psychiatre des Hôpitaux août 2006
« Pan-Hellenic Congress : Psychiatric Reformation in Europe and Greece-History, Theory and Action, April 7-9, 2006”
Docteur Guy Baillon, Psychiatre des Hôpitaux, Bondy près de Paris : “Are they any lessons, negatives and positives, you could get from French ‘Politique de Secteur’, 1960-2006”
En tant que simple psychiatre médecin chef de secteur dans notre service public, j’ai eu la chance de mener toute ma carrière dans le même secteur (14) du même département (93, la Seine St Denis, au nord de Paris) où j’ai participé à une évolution passionnante. En effet avec la même équipe nous avons pu passer en 30 ans de l’asile à une psychiatrie de secteur totalement relocalisée dans nos villes hors tout hôpital ; le fait d’avoir vécu les deux dernières années de ma carrière dans ce nouveau cadre m’a apporté tant de joie que j’ai eu le désir de témoigner ensuite de la richesse qu’a été ‘la psychiatrie de secteur’ dans cette épopée.
J’ai été invité à faire devant vous un ‘vrai’ bilan de la psychiatrie de secteur en France. Il ne saurait être qu’historique, et ce sera un simple survol. Sachez que malgré la multiplication des ‘rapports officiels’ sur la psychiatrie depuis 20 ans, près d’une dizaine, ce bilan ‘historique’ n’est toujours pas fait. Si l’Etat freine à le faire, ne serait ce pas parce qu’il mettrait en évidence la pertinence de cette politique, alors que l’aile libérale française, majoritaire actuellement, aimerait s’en débarrasser ?… tendancieux n’est ce pas !
« Des idées, des hommes, des institutions et des lois ».
La raison en est la force que contre vents et marées cette politique s’est enracinée sur le terrain, alors que ni l’Etat, ni les lobbies au pouvoir n’ont manifestement pris toutes les mesures qui auraient permis de l’appliquer complètement. Dès le départ il y a eu un ‘décalage’ entre le projet de la psychiatrie de secteur et les moyens qui lui sont accordés, et ce décalage se retrouve tout au long son histoire.
Nous voudrions ici, pour éclairer cette question, dégager les points suivants :
I -- dans une première partie aborder :
1-la naissance de la psychiatrie de secteur et ses objectifs
2-son hypothèse et ses principes
3-les premiers avatars de sa réalisation jusqu’en 1990
II --ensuite dans une seconde partie :
4-la période, dure, 1990-2000
5-ce qui permettra de mettre en évidence le décalage entre le but et les résultats
6-et donc peut être …d’en tirer quelques leçons.
Première partie. Naissance de la politique de secteur :
Le projet de cette politique est né dans les suites de la dernière guerre : avec le constat de l’abandon des malades dans les anciens asiles et la mort de faim de plus de 40.000 d’entre eux, l’expérience des camps de concentration et la comparaison troublante entre le fonctionnement social de chacun de ces deux espaces (les Kapos et les ‘bons malades’). Mais aussi après la douloureuse expérience de la séparation, de l’éloignement des patients dans les asiles, de la concentration des soins dans ces espaces de bannissement ; l’espoir de soigner autrement était né de diverses façons en dehors des hôpitaux depuis les années 1930. La volonté des promoteurs d’une nouvelle politique était de montrer que l’on devait soigner les troubles psychiques en s’appuyant sur l’environnement humain des personnes malades, tout en précisant, que la référence forte était la Cité, c’est à dire un espace créé par des hommes liés par le ciment d’une histoire commune (Bonnafé, puis Hochmann).
Simultanément, un enjeu fondamental s’est engagé dans l’immédiat après guerre, 1945-1950, (avant donc la première formulation de la psychiatrie de secteur) avec l’instauration de la Sécurité Sociale (la Sécu). Elle a permis le financement national de tous les hôpitaux (et parmi eux les hôpitaux psychiatriques, puisque les anciens asiles avaient pris la dénomination d’hôpital psychiatrique en 1937) exprimant ainsi une solidarité nationale à l’égard de tous les malades, la gratuité des soins psychiatriques dans le service public étant totale.
Le début de cette ‘révolution’ n’a été marqué que par la publication de deux simples circulaires ministérielles adressées aux Préfets les 14 et 15 mars 1960. La première posait les principes de cette politique nouvelle, la seconde voulait faire face à l’horreur du moment : l’inhumanité des hôpitaux psychiatriques. Mais elles n’étaient appuyées par aucun moyen financier. Cela explique qu’elles n’ont presque pas eu d’effet concret. Cependant elles ont contribué fortement à l’éveil des soignants, si bien qu’avec la mobilisation populaire suivante, celle de 1968, le terrain était près pour amorcer un vrai changement ; un petit groupe d’hommes (les tenant d’un projet « désaliéniste », avec surtout Lucien Bonnafé, Daumezon, Mignot, et Mamelet, Bailly-Salin, Ayme, Chaigneau, Misés, Paumelle, Hochmann…, inspiré aussi par le courant contemporain de la psychothérapie institutionnelle, avec Tosquelles, Oury, Torrubia…et d’autres, différents mais convergents Sivadon…), allait s’appuyer sur une forte mobilisation professionnelle autour de l’élaboration pendant 3 ans de débats du « Livre Blanc de la Psychiatrie » 1965-67 avec la société de ‘L’Evolution Psychiatrique’. Une nouvelle circulaire aux Préfets (14 mars 1972) lançait l’installation de cette politique en nommant sur l’ensemble du territoire les « médecins chefs de secteur » nécessaires, désignés comme étant la cheville ouvrière, ayant la responsabilité de veiller à l’élaboration des soins, de la prévention et de la post cure d’une population limitée à environ 60 à 70.000 habitants.
Cependant les obstacles à l’application de cette politique restaient considérables, les hôpitaux étaient énormes et à l’extérieur des villes. Même si chaque équipe de secteur était rattachée à un hôpital, chacune avait la quasi totalité de ses moyens concentrés dans l’hôpital. Les directeurs, n’étant chargés d’aucune responsabilité dans l’application de cette politique, y étaient le plus souvent indifférents ; pour développer des soins hors de l’hôpital les psychiatres étaient obligés de convaincre eux mêmes les élus et responsables départementaux, seuls à même de décider leur financement en engageant une participation du département. Beaucoup acceptèrent l’enjeu, mais la cohésion était laborieuse.
Cette évolution stagnante sur le plan des réalisations contrastait avec une mobilisation de plus en plus grande (avec le SPH, le Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux) et une augmentation de leur nombre (ce SPH fut aussi de 1964 à 1984 une ‘haute école de santé publique’ pour les psychiatres de ces générations, ce qui a gravement manqué par la suite).
Hypothèse clinique de la psychiatrie de secteur :
Avant de décrire la période 1981-1990 reprécisons d’abord ‘l’hypothèse clinique’ base de la politique de secteur. C’est essentiel, car une transmission fâcheuse s’est faite rapidement, la réduisant à sa traduction administrative : pour celle ci la politique de secteur serait seulement un découpage comptable de population, celui ci s’est souvent réalisé en divisant villes, et banlieues sans tenir compte des liens de citoyenneté.
Nos collègues, psychiatres fondateurs, étaient partis, eux, de constats préalables précis :
-les troubles psychiques graves ne sont pas ‘ponctuels’, mais se déroulent tout au long de la vie, et de façon variable, de plus leur évolution n’est pas systématiquement péjorative comme l’avait laissé croire la tradition ‘aliéniste’,
-en même temps et sous l’influence de la plupart des pathologies l’insertion sociale de tout patient est altérée, d’où la rupture fréquente du patient avec son histoire comme avec son environnement, qui aboutit même à une rupture profonde de tous ses liens sociaux,
-face à ces évolutions l’hôpital avait montré sa carence pour reconstruire ces liens, en raison de son contexte de séparation, d’isolement, d’éloignement, et de sa concentration inhumaine,
-en même temps les soins de proximité paraissaient de plus en plus réalisables et efficaces ; il était évident qu’ils nécessitaient l’implication d’une ‘équipe pluridisciplinaire’, en particulier pour les psychotiques dont la vie psychique est morcelée, si vite classés comme ‘chroniques’.
Le projet de la politique de secteur est de rechercher à construire des outils de soin « à dimension humaine », la référence étant l’homme, à décliner pour tout et de faire porter le travail de la psychiatrie sur les liens sociaux de tout homme. Ce travail sur les liens n’était pas éducatif, ni comportemental, mais basé sur un travail psychique individuel et collectif. Une seule équipe de soin, pluridisciplinaire, avait la mission d’assurer soins, prévention et postcure pour tous les membres d’une même population de taille modeste (70.000h).
Petite contradiction, la distinction, qui se justifiait pour respecter la fragilité des enfants et adolescents en les suivant ailleurs qu’avec les adultes (ainsi une équipe infanto-juvénile est créée pour trois équipes de psychiatrie générale, 200.000h), a créé une séparation qui s’est avérée ensuite trop lourde entre les acteurs de ces deux équipes sur le terrain.
Les trois principes « fondamentaux » de la psychiatrie de secteur ont bien été cliniques :
-la continuité des soins, concerne la totalité des troubles psychiques, centre le soin autour du domicile ; elle justifie qu’une élaboration clinique essentielle soit ‘distillée’ pour la réaliser,
-l’appui des soins sur le contexte humain, l’environnement relationnel de chaque patient, remplaçant le dogme de la séparation ; elle était à défricher totalement car la psychiatrie avait jusqu’alors établi des ‘clivages’ entre le patient et le reste de la société ; c’est le travail sur le tissu relationnel qui commence par l’appui sur la famille, et se poursuit sur l’entourage,
-l’accessibilité des soins, la proximité entre espaces de soin et lieu de vie des patients associée à la disponibilité des soignants, met fin à l’éloignement des hôpitaux psychiatriques.
1981-1990 –Période d’officialisation de la psychiatrie de secteur :
-1981: la gauche arrive au pouvoir (notons que chacun des trois mouvements ‘populaires’ 1945, 1968, 1981 a été contemporain d’un réexamen de la politique de santé mentale en France). Jack Ralite, ministre de la santé, communiste, prononce un discours mobilisateur à Rouen et demande à notre collègue Jean Demay de rédiger un rapport sur l’avenir de la psychiatrie. Ce texte, bref mais d’une belle écriture, et rédigé avec du ‘souffle’, propose une psychiatrie qui privilégie ‘l’homme’ et donne les bases de la réflexion clinique qui l’inspire. Il ne demande qu’une seule mesure concrète : la création pour un à trois secteurs d’un « Etablissement Public de Secteur » remplaçant l’énorme administration de l’hôpital et du département. Vous savez que lorsque l’on veut mener à bien une psychothérapie d’un tout jeune enfant, on commence par s’adresser à l’enfant en se mettant à son niveau, près du sol. Ainsi l’administration pour être adaptée se doit de se mettre au même niveau que le travail clinique, celui d’un seul secteur, et non d’une grande concentration hospitalière. L’état de grâce de 1981 ne dure pas, les socialistes écartent les ministres communistes et leurs propositions. Le rapport Demay est censuré, mais provoque en 1983 la reprise par l’Etat de l’étude des dispositions nécessaires à l’application de la politique de secteur : une Commission des Maladies Mentales est constituée au ministère, l’Etat sous son impulsion va corriger son indifférence et prendre un train de mesures installant fermement cette politique :
-en 1984 au lieu de deux financeurs (Sécu-hôpital et Département-secteur), la Sécu finance seule, chaque équipe de secteur trouve l’unité nécessaire à son fonctionnement,
-en 1985 l’Etat, sachant qu’il faut localement un responsable, donne cette mission aux directeurs d’hôpitaux dans une loi qui officialise, enfin après 25 ans, la politique de secteur,
-en 1986 la Sécurité Sociale reconnaît la valeur thérapeutique des nouvelles formes de soin données dans les nouvelles structures (décret du 14 mars 1986 déclinant les 12 structures de soin ‘homologuées’, 6 sans hébergement, et 6 avec) : «(sans) Centre Médico-Psychologique, hôpital de jour, Centre d’Accueil Permanent, atelier protégé, Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel, famille d’accueil thérapeutique, puis (avec) Hôpital temps plein, hôpital de nuit, foyer, Centre de Crise, hospitalisation à domicile, appartement thérapeutique ».
Ces mesures ont des résultats considérables ; elles donnent corps d’abord à la délimitation des secteurs sur la totalité de la France : 830 ; ainsi seront créées en 20 ans 830 équipes de psychiatrie générale, 320 infanto-juvéniles et 20 pénitentiaires, au total 1170 équipes. Soulignons que bien que lente, inégale, cette application a couvert la totalité du territoire français et donné partout une armature de service public ayant une force considérable :
-pour chaque équipe seront créées (ceci varie localement) plusieurs structures de soin,
-le nombre de patients suivis chaque année par équipe double (passe de 600 à 1200 ),
-le nombre des hospitalisations va diminuer, ainsi que le nombre de lits occupés,
-l’amélioration de la tolérance de la psychiatrie en ville sera régulière, les réactions des médias ne seront plus toutes négatives.
Mais, … Vous m’obligez aujourd’hui, en m’invitant à faire ce bilan, à parler aussi de ses défauts ! Ils existent. En fait ils ont commencé très tôt et que leurs effets vont s’aggraver avec les évènements ultérieurs. Certes les responsabilités sont multiples. Les solutions choisies vont se pervertir parce qu’elles ne seront « pas accompagnées » par l’Etat ; l’Etat va se retirer de son rôle de régulateur dès 1990 :
-de même le désengagement des élus départementaux écartés des décisions financières entrainera une perte d’intérêt envers la psychiatrie,
-la désignation du Directeur d’hôpital comme décideur va centrer tout le dispositif décisionnel non sur le secteur, (les circulaires avaient précisé que le pivot devait être le CMP), mais sur l’hôpital : c’est le début de l’hospitalocentrisme qui ne fait que se renforcer,
-l’arrêté du 14 mars 1986, qui avait permis la reconnaissance par la Sécu des activités sur le secteur comme étant des soins, aurait du être renouvelé tous les trois ans. Il ne le sera jamais. Ceci va entrainer un blocage de l’imagination des soignants pour renouveler leurs soins, et une perversion de cette politique dans beaucoup d’équipes : en effet elle facilite le mouvement vers le développement de prétendues ‘spécialisations’ qui en fait ne sont que des tentatives pour flatter la notoriété des psychiatres entre eux. Sous prétexte d’économies elle va favoriser l’écrémage de certaines pathologies ; des patients sont envoyés dans des « intersecteurs » parce qu’ils sont porteurs d’un symptôme (sommeil, anorexie, dépression, etc.) ; les patients de plusieurs secteurs adressés à une équipe d’intersecteur sont ainsi éloignés de leur environnement au profit d’une ‘technique’ de soin limitée ; ceci aboutit à la dégradation de la psychiatrie ‘générale’, car faire face à toutes les pathologies d’une même population était le fondement de la psychiatrie de secteur.
Tout cet ensemble conforte l’évolution vers l’hospitalocentrisme.
Nous ne sommes qu’en 1990 : à cette époque les soignants, encore optimistes et motivés, n’ont pas encore compris que le fait de ne pas avoir pu s’attaquer frontalement (mais le rapport de force politique était totalement en leur défaveur) à l’énorme poids de « l’hôpital » allait avoir des conséquences irrémédiables.
Il aurait fallu d’emblée en effet, et simultanément au déploiement des soignants dans le tissu du secteur, que soient prises les deux décisions suivantes :
-1-une planification de tous les secteurs avec l’octroi de moyens humains équivalents (dès le départ des inégalités considérables entre équipes voisines et entre départements ont été installées sur la base précédente de l’inégalité des asiles)
-2-l’installation des lits hospitaliers dans la ville du secteur (20 lits par équipe suffisent). La persistance des grosses concentrations hospitalières, son résultat étant l’hospitalocentrisme,
vont redonner un poids de plus en plus lourd à la dynamique des soins : elle reste centrée sur l’hôpital et privilégie l’hospitalisation …
Ces deux mesures n’ont pas été prises. De plus dès 1984 les psychiatres vont diminuer leur poids politique, car en raison de leur nombre croissant, ils vont faire éclater leur syndicat unique en 4 à 5 syndicats, ceux ci ne défendront plus d’une seule voix une politique d’ensemble sur la santé mentale, trop fascinés par leur clientélisme.
Ainsi le refus de prendre une position radicale contre l’inhumain de l’hôpital a cherché à être remplacé par une pluie de textes officiels, trop nombreux, mélangeant la logique du soin et la logique gestionnaire ; le résultat dans les équipes a été la confusion des rôles et le blocage de l’imagination des soignants, alors que celle ci est une nécessité de la pratique psychiatrique.
IIème partie
Nous avons distingué dans la première partie le début de la psychiatrie de secteur :
-les principes, tirés de son origine historique,
-les avatars de son application dépendant du contexte : les hommes, les institutions, les lois.
Nous allons maintenant résumer l’étape ultérieure de sa mise en place, en soulignant que la psychiatrie française s’est donnée dans son objectif de réforme deux tâches simultanées, dont les lignes de force sont en fait opposées, d’où l’aspect discordant du résultat observé :
-d’une part se réalise le développement de formes et de structures de soin nouvelles dans le tissu social de chaque secteur (en suivant les règlements officiels décidés en 1985-6) où la dimension humaine est recherchée pour chacune,
-d’autre part l’effort d’humanisation des services hospitaliers a comme résultat de renforcer la psychiatrie que l’on voulait remplacer ; certes le souci humain est le même, mais ici régi par des règles administratives qui vont en pervertir le résultat, car y priment des règles de gestion anonymes et distantes du terrain, où la dimension humaine est constamment malmenée, par le monstre économique que continue à être l’hôpital.
La décennie 1990 – 2000 :
Centrons le bilan général sur les années 2000-2006, avec tout d’abord quelques chiffres :
Pour le seul service public et donc les 830 secteurs (830 équipes de psychiatrie générale, 350 de psychiatrie infanto-juvénile, et 20 pénitentiaires) :
-le nombre des psychiatres a augmenté de 800 vers 1965, à 4000 en 2001, (auxquels s’ajoutent 9000 psychiatres dans le privé et l’associatif, ce qui place la France au 2ème rang parmi les pays dont la densité de psychiatres par habitant est la plus forte), mais 800 postes du public ne sont pas pourvus aujourd’hui parce que… les psychiatres choisissent de préférence le privé ! (ces carences, 1 poste vide sur 5, jamais comblées par l’administration aboutissent à des situations catastrophiques du fait de la répartition très inégale dans le pays),
-le nombre d’infirmiers du service public de psychiatrie aurait un peu diminué autour de 60.000, mais surtout leur statut a changé. Ils ne sont plus ‘infirmiers psychiatriques’, mais ‘infirmiers diplômés d’Etat’, donc sans distinction avec ceux qui travaillent en médecine, chirurgie, obstétrique…, de ce fait ils ont perdu leur identité et il leur devient très difficile de s’identifier à la spécificité de la psychiatrie, et de la défendre seule ; en même temps :
-le nombre de lits a diminué de 110.000 à 60.000,
-les structures de soin se sont multipliées, mais très inégalement, environ : 1500 à 2000 CMP, 600 à 800 hôpitaux de jour, 1000 à 2000 CATTP, …
-le nombre de patients suivis par an a augmenté pour arriver à environ 1,2 million,
-chaque équipe de secteur suit environ 1200 patients par an en moyenne (la file active désigne le nombre de patients vus par an, quels que soient le nombre de séjours et leur durée),
-en sachant que 20% d’entre eux ont eu un temps d’hospitalisation temps plein et que 80% ont été suivis exclusivement en ambulatoire.
Une amélioration considérable…et pourtant en 2002 les psychiatres français se réunissent bruyamment à Montpellier pour pleurer sur leur sort en disant qu’ils manquent de moyens…Nous avons vu que nous sommes le 2ème pays le plus riche !
Une telle attitude est aux yeux des autres pays ‘inacceptable’. Elle a une explication : les moyens sont en France très mal répartis (Paris, les grandes villes, la côte sont très bien pourvus, et le privé est choisi de préférence au public), du coup la situation locale de certaines équipes est désastreuse. Le paradoxe est que les équipes bien loties se plaignent aussi.
Ainsi l’inégalité des répartitions et des évolutions locales entraine des différences considérables sur le terrain, ce qui montre que tout bilan général qui se contente d’une ‘moyenne’ constitue une falsification de la réalité, en effet :
-un grand nombre d’équipes, rencontrent une autre difficulté : elles sont déchirées entre ces deux pôles de travail aux règles opposées, -le travail dans le secteur, -et le travail à l’hôpital (le but de la psychiatrie de secteur c’était une vision globale des soins, une cohésion de fonctionnement, aboutissant à une vraie continuité des soins), et se sont trouvées épuisées, bloquées, en très grand désarroi,
-d’autres équipes au contraire, parce qu’elles ont pu construire une continuité de réflexion, ont pu mener plus loin la réalisation de cette politique ; quelques unes ont quitté en totalité et définitivement l’ancien hôpital psychiatrique, sans pour autant s’enfermer dans un hôpital général (celles qui ont émigré dans un hôpital général se sont le plus souvent retrouvées dans un autre ghetto tout en perdant un à deux tiers de leurs moyens humains) et en installant leurs lits dans des immeubles neufs de la ville même. Ainsi en Seine St Denis, le 93, au nord est de Paris, à Neuilly s Marne dans l’hôpital psychiatrique de Ville-Evrard (asile créé en 1868 et ayant rassemblé 2000 patients hommes, face à l’asile de Maison-Blanche et ses 2000 femmes réservé à Paris) sont rattachées 17 équipes de secteur pour un million d’habitants ; en 2000, 8 de ces 17 équipes ont installé chacune leurs 20 lits (elles en avaient 100 à 160 avant), réparties sur trois sites en ville, hors hôpital : ces 8 équipes y réalisent enfin une psychiatrie humaine, toute simple, sans avoir besoin de mesures de contrôle ni de sécurité ; les soins y associent les habitants des villes, lesquels vont et viennent simplement dans cet espace de soin ; ces équipes s’appuient sur les ressources de l’entourage, en effet les habitants l’investissent eux mêmes comme l’un des espaces de leur ville ; la psychiatrie n’est plus stigmatisée par la séparation, ni par l’exclusion. J’ai eu la joie d’y vivre les deux dernières années de ma carrière et j’ai été émerveillé du résultat. De plus ces équipes ont souvent décidé de se montrer attentives à la mise en place « de centres d’accueil » : grâce à quelques soignants qui dans chaque équipe de secteur ont la mission de faciliter le lien et, quand nécessaire, le passage entre la communauté sociale et le soin ; ils veillent là à l’élaboration des demandes de soin et au choix des modalités d’entrée dans le soin les mieux adaptées, par ce travail précis ‘de proximité’. Nous avions fondé dès le début en 1982 de grands espoirs dans la réalisation de ces ‘Accueils’ au point de penser qu’ils se multiplieraient en France, en fait il y en a 5 dans le 93, mais ils ne sont que 40 en France. Notre équipe a beaucoup travaillé ce point nodal du soin, ces moments où l’on peut prévenir les ‘urgences’ et où l’on écarte le non besoin de soin, et où l’on améliore les indications de soin ce qui ainsi diminue le besoin d’hospitalisation. Nous pensons que le résultat de ce travail d’accueil est passionnant (« Les urgences de la folie » de Guy Baillon chez Gaétan Morin éditeur, 1998).
Cette diversité de résultats rend très difficile la lecture de notre service public par l’opinion comme par les tutelles, et comme l’idéal du service public est l’égalité des droits, cela… participe plutôt à une perte de crédit de la politique de secteur dans l’opinion !
1990 : D’autant qu’après 1990 les difficultés vont s’amonceler. Il y a là deux responsables :
-l’Etat : ferme en 1990 le bureau de la psychiatrie au ministère de la santé, initiateur des textes de 1983-6, il se désintéresse de la psychiatrie de service public. Celle ci, non accompagnée, va évoluer, mais, dans l’anarchie, sous le seul effet des acteurs locaux,
-les psychiatres dispersés en 4 à 5 syndicats dès 1984 seront trop pris par leurs soucis corporatifs et saisis par le seul individualisme vont perdre toute influence, ils ne peuvent plus élaborer une politique de santé cohérente.
Ces difficultés sont malheureusement aggravées, par une hémorragie persistante des psychiatres quittant le service public pour aller dans le privé (ils sont 3200 pour 4000 postes publics alors que 10.000 autres sont dans le privé) et par la disparition du diplôme d’infirmier psychiatrique. Les professionnels sont de moins en moins nombreux pour défendre les principes fondamentaux de la psychiatrie de secteur : « la continuité des soins, l’appui sur le contexte relationnel, l’accessibilité des soins », et sa réalisation concrète.
Ensuite l’Etat, en se centrant sur la médecine, va prendre des mesures officielles dont l’esprit et le résultat sont en totale opposition avec la psychiatrie de secteur :
-sous prétexte d’‘humaniser’ la vieille loi de 1838 sur l’internement, sa réforme de juin 1990, bloque le déploiement des soignants dans le tissu social en renforçant les seules urgences des hôpitaux généraux ; elle a rendu très facile l’enfermement des patients pour les motifs les plus simples (un délire en salle d’urgence est interprété comme refus de soin, un manque de temps des soignants suffit à parler de refus de soin, et ils entrainent une hospitalisation sous contrainte) ; cette loi légitime l’arbitraire, depuis, les hospitalisations augmentent sans cesse,
-l’Etat a incité à rassembler les soins en ciblant un seul symptôme (urgence, sommeil, dépression, troubles alimentaires, personnes âgées, suicide, etc…) en ‘structures de soins’ dites ‘intersectorielles’, à distance du secteur, écartant ainsi l’appui sur le contexte relationnel, mettant en miettes la psychiatrie générale, fondement de la psychiatrie de secteur, pour favoriser de prétendues ‘spécialisations’,
-il a multiplié les formes de contrôles et de comptabilité, calquées sur le modèle médical, non adaptées à la psychiatrie, ni aux soins dans le secteur, toutes centrées sur l’hôpital (PMSI, accréditation, qualité, hôpital 2007, gouvernance), et étouffant les équipes qui au contraire ont besoin d’avoir l’esprit assez libre pour développer un travail nouveau, à inventer,
--le résultat global est l’hospitalocentrisme (l’hôpital est la préoccupation centrale, les hospitalisations augmentent, le directeur et son conseil d’administration décident de tout à partir de l’hôpital et de sa logique surdimensionnée et inhumaine, au lieu de se centrer sur les besoins propres à chaque population de secteur) ; donc se produit une évolution opposée à la politique de secteur. Ses conséquences sont cruelles : le besoin de sécurité est croissant dans les énormes hôpitaux, sans que l’administration comprenne que ces grands espaces sont générateurs de pertes de liens, d’anonymat, ‘d’inhumanité’, car trop ‘abstraits’, trop grands, dans cette ambiance la peur surgit à chaque instant…Au contraire, dans les lieux de vie du patient, la proximité, la disponibilité des soignants permettent à tout soin de s’appuyer sur les relations humaines du patient constamment restaurées.
Dans le même temps, profitant de cette situation, le secteur privé n’exploitant que de petites structures à taille humaine, avec le niveau relationnel très fort des classes aisées a beau jeu de dire que ses soins donnent de meilleurs résultats que le service public. Ainsi se construit progressivement aux dépens du service public une psychiatrie à deux vitesses.
Alors le résultat final ? vous vous attendez à ce que je convienne que c’est une catastrophe : en raison de ces obstacles, de ces attaques, de ces abandons successifs, venant de l’intérieur comme de l’extérieur du service public ? La psychiatrie de secteur serait elle détruite ?
Eh bien non ! Je peux témoigner devant vous que LA PSYCHIATRIE DE SECTEUR SURVIT, ELLE « RESISTE » !
Même le ministère, la cite tout le temps comme 'sa politique' dans tous les textes officiels sur la santé. De plus sur le terrain la quasi majorité des soignants (sauf la plupart de nos universitaires fascinés par les exigences de la notoriété internationale qui ne prend jamais en considération la psychiatrie de secteur française, car elle serait 'non scientifique', aussi se limitent-ils à la biochimie et au comportementalisme), se réfèrent à la psychiatrie de secteur et s'y montrent attachés, malgré leur désarroi !
Conclusion :
Quelle est donc la raison de cette résistance ? Pourquoi est elle si forte ?
Source : Site SERPSY