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POSITION DU SNPP (Syndicat national des Psychiatres privés)

24 novembre 2003


Rédigé le Lundi 5 Janvier 2004 à 00:00 | Lu 551 commentaire(s)



POSITION DU SNPP (Syndicat national des Psychiatres privés)

26 novembre 2003

Lettre d'Yves Froger,
Secrétaire Général de l’A.F.P.E.P. - S.N.P.P.
à propos de la position du SNPP
sur l’amendement Accoyer concernant
l’exercice et la pratique des psychothérapies


Paris, le 24 novembre 2003


Synthèse des réflexions du Bureau du S.N.P.P. à propos du débat sur les psychothérapies


À propos du débat sur les psychothérapies

Cet automne a été d’une exceptionnelle richesse en matière de rapports officiels et de travail législatif à propos de la psychiatrie. Qu’on en juge :

* plan d’action Cléry-Melin publié le 15 septembre ;
* présentation de la première phase des travaux de la réforme de la nomenclature par la CNAM-TS le 23 septembre ;
* rapport Berland sur les transferts de compétences début octobre ;
* amendement Accoyer le 8 octobre.

Or, tous ces travaux ont un point commun : la pratique des psychothérapies. Selon des angles d’attaques différents, ils convergent tous vers une redéfinition des psychothérapies, la réglementation de leur exercice et la place qu’elles doivent tenir dans l’organisation des soins. Jusque-là invisible, peu connue et souvent mal reconnue, l’activité psychothérapique des psychiatres fait donc une entrée fracassante dans le système de soins.

Serait-ce pour en déposséder les psychiatres et la confier à d’autres professionnels ? Peut-être.

Pour le moins, il est question dans ces textes de formater l’activité psychothérapique selon un cadre défini par l’ANAES et qui sera ensuite imposé par décret ministériel.

La volonté d’offrir une garantie de qualité des soins au public, la nécessité d’élargir l’accès aux soins au-delà des seuls psychiatres, sont les motifs officiels d’une telle démarche. Mais n’y a-t-il pas une méprise fondamentale sur l’objet des débats ?

Cela nous oblige à clarifier une fois de plus ce que signifie le terme de psychothérapie dans notre pratique et cela de notre position de psychiatres d’exercice privé et non pas d’une position de psychanalyste, voire de " psychothérapeute ", terme que nous avons toujours récusé.

Nous avons déjà largement publié sur cette question à une époque (2000-2002) où ce débat sur la réglementation des psychothérapies occupait déjà le devant de la scène. Nos positions n’ont pas changé depuis. Nous les rappelons en quelques points, les argumentaires de fond pouvant se retrouver dans les BIPP de cette époque, ou dans les archives de notre site Internet.

* L’acte psychiatrique, dans lequel s’actualise le traitement mis en œuvre par le psychiatre, associe à chaque consultation une écoute et une interprétation de la parole du patient, dans le but de produire des effets psychothérapeutiques.

* S’ils supposent une formation spécifique à une ou plusieurs approches psychothérapiques - formation qui n’est actuellement pas organisée par l’Université et que les psychiatres ont de tout temps été chercher dans des institutions privées - ces effets psychothérapeutiques ne peuvent être produits par la seule mise en œuvre d’une technique, si parfaitement maîtrisée qu’elle soit par le psychiatre. Les effets psychothérapeutiques supposent en effet de la part du praticien la capacité d’élaborer et d’ajuster constamment sa réponse thérapeutique en fonction de l’évolution clinique de chaque patient.

* Cette adaptation permanente de la réponse thérapeutique impose en amont une solide formation, théorique et clinique, en psychopathologie, ainsi qu’une formation théorique et pratique à au moins une approche psychothérapique. Ceci afin, d’abord, de poser les indications du traitement, et ensuite de rendre compte des effets observés, à la fois dans le cadre général de références théoriques reconnues par l’ensemble de la communauté professionnelle et dans le cadre particulier de la théorie qui fonde spécifiquement la psychothérapie mise en place.

* Enfin, l’indispensable inventivité nécessaire à l’efficacité des soins exige certes d’être encadrée par une déontologie connue du public et fermement maintenue par les organisations professionnelles mais certainement pas d’être stérilisée par un décret.

En d’autres termes, s’il existe bien des différences entre les psychothérapies, le traitement, pour avoir des effets psychothérapiques, ne peut en aucun cas se réduire à l’application pure et simple d’une technique car l’efficacité repose sur l’élaboration et l’ajustement permanent d’une stratégie de soins évolutive au cas par cas.
Or, quel que soit le texte auquel on se réfère parmi ceux que nous avons cités, il est frappant de constater que la psychothérapie n’y est appréhendée qu’en tant que technique. Dès lors, tout le débat est faussé et s’organise inévitablement autour de deux questions centrales : Qui détient l’autorité de définir la psychothérapie (et non pas d’amalgamer psychothérapies et techniques) ? Quelle formation permet valablement d’acquérir ces compétences ?

Notre position tient en peu de mots :

* Si certains, qui s’intitulent eux-mêmes psychothérapeutes, souhaitent persister dans l’illusion que l’application académique d’une technique peut, à elle seule, produire des effets psychothérapiques et sans danger, libre à eux de le croire. Mais, dans ce cas, nous dirons que cela ne concerne pas les psychiatres, notamment les psychiatres d’exercice privé qui n’ont pas à décider de la délégation et de la supervision des pratiques de ce type d’intervenants.

* Si, à force de bruit plutôt que de rigueur clinique, ceux qui se disent psychothérapeutes en venaient à convaincre la puissance publique que l’opératoire psychothérapique tient uniquement à la mise en œuvre méthodique de techniques codifiables, évaluables et garanties par l’ANAES, libre à eux de se soutenir d’un tel discours, mais nous dirons alors que le champ psychothérapique de la psychiatrie est d’une autre nature, ne serait-ce que parce qu’il articule constamment la clinique relationnelle à une séméiologie tenant compte non seulement de cadres psychopathologiques mais aussi de la dimension somatique pour ajuster le traitement.

* Si, enfin, ceux qui se disent psychothérapeutes prétendent que l’on peut valablement mettre en œuvre un traitement sans se soucier ni de diagnostic, ni de structure psychique, s’ils estiment pouvoir être efficaces sans réélaborer constamment les évolutions observées dans un cadre théorique, alors nous dirons qu’il y a danger pour le public et que ce n’est pas sans motif qu’ils seraient écartés du champ du soin par une réglementation.

Certes, de même que la psychiatrie n’est pas la propriété des seuls psychiatres, la psychothérapie ne leur est pas réservée. Toutefois, parce que leur formation en a fait des spécialistes de la clinique psychopathologique, y compris dans ses interrelations complexes avec le corps, parce qu’ils sont médecins, c'est-à-dire confrontés aux questions relatives à la vie et à la mort et toujours responsables de leurs actes devant la loi, ce sont bien les psychiatres et eux seuls, qui réunissent toutes les conditions requises de l’efficacité psychothérapique tant par leur formation que par l’organisation de leur profession.

Libre à ceux qui se veulent psychothérapeutes de démontrer qu’ils sont d’excellents techniciens si telle est leur ambition. Mais, dans ce tumulte, que l’on dispense les psychiatres d’avoir à rappeler que leur mission est ailleurs : il s’agit de soigner, c'est-à-dire de réélaborer constamment un traitement, et non pas de courir après un label, qu’il soit décerné par l’ANAES ou par quelque institut privé de psychothérapie, et qui ne garantit rien.

Pour le Bureau de l’A.F.P.E.P. - S.N.P.P.
Jean-Jacques Laboutière
Syndicat National des Psychiatres privés


24 novembre 2003



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