Après avoir pris connaissance du « Plan d’actions pour le développement de la psychiatrie et la promotion de la santé mentale », sur lequel s’est appuyé l’amendement Accoyer réglementant la pratique des psychothérapies, en tant que Psychologues de la Fonction Publique Hospitalière, représentant les Collèges des Hôpitaux mentionnés ci-après, nous tenons à vous faire part des réflexions qu’a suscité le document en question.
Tout d’abord, nous ne pouvons que nous réjouir que soit présenté comme axe prioritaire le projet de « réorganiser l’offre de soin de première ligne » en y intégrant entre autres les psychologues cliniciens, et de « faciliter l’accès aux psychothérapies ».
En effet, les auteurs du rapport reconnaissent ainsi la dimension psychique et le rôle de la psychothérapie dans le champ du soin. Cependant, nous nous inquiétons que les dites psychothérapies, quelle que soit leur orientation, soient toutes ramenées à des actes nomenclaturés et ramenées à des « techniques standardisées » selon des critères collectifs anonymes dits « de bonne pratique » qui détermineraient l’indication, la méthode psychothérapeutique et la formation requise.
Nous nous inquiétons également que les personnes qui s’adresseraient à des psychologues exerçants tant en cabinets privés que dans des établissements de santé ou bien médico-sociaux devraient se soumettre à une expertise psychiatrique préalable en consultant un psychiatre coordinateur d’un Centre Médico-psychologique Ressource Territorial, seul habilité à évaluer le bien fondé de la demande, à prescrire la psychothérapie et à l’orienter vers le psychothérapeute de son choix. Ce n’est qu’à ces conditions que les psychothérapies pourraient être prises en charge par l’assurance maladie.
Nous ne pouvons accepter que, dans ce projet, l’accès direct au psychologue pourrait ainsi se heurter à des « protocoles » qui loin de faciliter l’accès aux psychothérapies, constitueraient autant d’obstacles et iraient à l’encontre de la simplification des démarches que les Pouvoirs publics appellent de leur vœu. C’est dire également que, actuellement, si nous exerçons au sein d’équipes pluri-professionnelles, en particulier au sein de CMP des secteurs de santé mentale, nous ne sommes pas des paramédicaux, comme le stipule notre Statut particulier. L’accès des personnes qui souhaitent nous rencontrer ne saurait dépendre d’aucune prescription médicale ou d’indications définies collectivement au préalable. Il en va de même concernant leur demande de psychothérapie.
En tant que Psychologues cliniciens, intervenant au sein de secteurs de santé mentale (adultes, adolescents et enfants), rappelons, que, outre notre Statut, notre formation de cinq années universitaire en faculté de lettres et sciences humaines (DESS de psychopathologie clinique) justifient les responsabilités qui sont les nôtres et qui impliquent des responsabilités cliniques, psychothérapiques et institutionnelles, ainsi que des fonctions d’enseignement et de recherche. Outre le fait que nous sommes formés au repérage des symptômes psychopathologiques, notre fonction clinique implique donc également une « approche globale de la personne » en souffrance incluant le traitement psychique qu’est la psychothérapie.
Quoiqu’il en soit, la rencontre avec un psychologue clinicien, si elle peut être soutenue et conseillée, ne saurait donc être « prescrite ». Elle repose sur la décision et le libre choix de la personne. Tout en sachant que, dans notre pratique, nous savons faire appel au médecin en cas de manifestations d’affections somatiques, il s’agit avant tout de préserver la demande de la personne concernée elle-même. En effet, c’est cette demande singulière, avec la relation particulière qu’elle instaure, qui fonde le fait que ce qu’on appelle « psychothérapie » n’est pas une technique mais un effet qui se vérifie après-coup, au bout d’un processus d’élaboration psychique corrélé à celui de verbalisation. Soit ce phénomène que Freud a découvert et théorisé sous le concept de transfert. Ainsi que le rappelle le Professeur F. Sauvagnat : « Le domaine des psychothérapies s’est d’emblée affirmé comme différent de celui des prescriptions médicamenteuses, et cela pour des raisons solides puisqu’il s’agit expressément de restituer au sujet un type radical de liberté ».
Qu’en est-il de ce libre-arbitre quand, d’emblée, comme le rapport Cléry-Melin le propose, on enlève à la personne la responsabilité de sa décision personnelle au profit de celle d’un tiers médecin ou d’une équipe fut-elle pluri-professionnelle, sous le prétexte non plus de « relativiser [sa] demande » comme l’affirmait un précédent rapport, mais de maîtriser les dépense de santé ? Au moment où est mis en avant le droit des malades, qui n’est autre que la reconnaissance de la personne en tant que sujet responsable de son acte, il nous faut rappeler que notre Code de Déontologie, auquel il est fait référence dans le dit rapport, proclame dans son titre I : « toute personne doit pouvoir s’adresser directement et librement à un psychologue », comme cela se passe actuellement dans les CMP du secteur publique. C’est ce droit élémentaire de la personne dans sa singularité même qui est contesté dans ce rapport qui met en place un dispositif de contrôle social soumis à l’idéologie de la standardisation que nous dénonçons.
Nantes, le 20 octobre 2003
L’Inter-collèges des Psychologues de Loire-Atlantique, Vendée, regroupant les Collèges des psychologues du CHU de Nantes (44) ,du CHS de Blain (44), du CHS de Montbert (44),du SISMLA (44), du CHS de la Roche-sur-Yon (85), du CH de St-Nazaire(44), de l’OCHS (44).
Contact :Michel Normand, CHS Montbert, 44140 MONTBERT
Tout d’abord, nous ne pouvons que nous réjouir que soit présenté comme axe prioritaire le projet de « réorganiser l’offre de soin de première ligne » en y intégrant entre autres les psychologues cliniciens, et de « faciliter l’accès aux psychothérapies ».
En effet, les auteurs du rapport reconnaissent ainsi la dimension psychique et le rôle de la psychothérapie dans le champ du soin. Cependant, nous nous inquiétons que les dites psychothérapies, quelle que soit leur orientation, soient toutes ramenées à des actes nomenclaturés et ramenées à des « techniques standardisées » selon des critères collectifs anonymes dits « de bonne pratique » qui détermineraient l’indication, la méthode psychothérapeutique et la formation requise.
Nous nous inquiétons également que les personnes qui s’adresseraient à des psychologues exerçants tant en cabinets privés que dans des établissements de santé ou bien médico-sociaux devraient se soumettre à une expertise psychiatrique préalable en consultant un psychiatre coordinateur d’un Centre Médico-psychologique Ressource Territorial, seul habilité à évaluer le bien fondé de la demande, à prescrire la psychothérapie et à l’orienter vers le psychothérapeute de son choix. Ce n’est qu’à ces conditions que les psychothérapies pourraient être prises en charge par l’assurance maladie.
Nous ne pouvons accepter que, dans ce projet, l’accès direct au psychologue pourrait ainsi se heurter à des « protocoles » qui loin de faciliter l’accès aux psychothérapies, constitueraient autant d’obstacles et iraient à l’encontre de la simplification des démarches que les Pouvoirs publics appellent de leur vœu. C’est dire également que, actuellement, si nous exerçons au sein d’équipes pluri-professionnelles, en particulier au sein de CMP des secteurs de santé mentale, nous ne sommes pas des paramédicaux, comme le stipule notre Statut particulier. L’accès des personnes qui souhaitent nous rencontrer ne saurait dépendre d’aucune prescription médicale ou d’indications définies collectivement au préalable. Il en va de même concernant leur demande de psychothérapie.
En tant que Psychologues cliniciens, intervenant au sein de secteurs de santé mentale (adultes, adolescents et enfants), rappelons, que, outre notre Statut, notre formation de cinq années universitaire en faculté de lettres et sciences humaines (DESS de psychopathologie clinique) justifient les responsabilités qui sont les nôtres et qui impliquent des responsabilités cliniques, psychothérapiques et institutionnelles, ainsi que des fonctions d’enseignement et de recherche. Outre le fait que nous sommes formés au repérage des symptômes psychopathologiques, notre fonction clinique implique donc également une « approche globale de la personne » en souffrance incluant le traitement psychique qu’est la psychothérapie.
Quoiqu’il en soit, la rencontre avec un psychologue clinicien, si elle peut être soutenue et conseillée, ne saurait donc être « prescrite ». Elle repose sur la décision et le libre choix de la personne. Tout en sachant que, dans notre pratique, nous savons faire appel au médecin en cas de manifestations d’affections somatiques, il s’agit avant tout de préserver la demande de la personne concernée elle-même. En effet, c’est cette demande singulière, avec la relation particulière qu’elle instaure, qui fonde le fait que ce qu’on appelle « psychothérapie » n’est pas une technique mais un effet qui se vérifie après-coup, au bout d’un processus d’élaboration psychique corrélé à celui de verbalisation. Soit ce phénomène que Freud a découvert et théorisé sous le concept de transfert. Ainsi que le rappelle le Professeur F. Sauvagnat : « Le domaine des psychothérapies s’est d’emblée affirmé comme différent de celui des prescriptions médicamenteuses, et cela pour des raisons solides puisqu’il s’agit expressément de restituer au sujet un type radical de liberté ».
Qu’en est-il de ce libre-arbitre quand, d’emblée, comme le rapport Cléry-Melin le propose, on enlève à la personne la responsabilité de sa décision personnelle au profit de celle d’un tiers médecin ou d’une équipe fut-elle pluri-professionnelle, sous le prétexte non plus de « relativiser [sa] demande » comme l’affirmait un précédent rapport, mais de maîtriser les dépense de santé ? Au moment où est mis en avant le droit des malades, qui n’est autre que la reconnaissance de la personne en tant que sujet responsable de son acte, il nous faut rappeler que notre Code de Déontologie, auquel il est fait référence dans le dit rapport, proclame dans son titre I : « toute personne doit pouvoir s’adresser directement et librement à un psychologue », comme cela se passe actuellement dans les CMP du secteur publique. C’est ce droit élémentaire de la personne dans sa singularité même qui est contesté dans ce rapport qui met en place un dispositif de contrôle social soumis à l’idéologie de la standardisation que nous dénonçons.
Nantes, le 20 octobre 2003
L’Inter-collèges des Psychologues de Loire-Atlantique, Vendée, regroupant les Collèges des psychologues du CHU de Nantes (44) ,du CHS de Blain (44), du CHS de Montbert (44),du SISMLA (44), du CHS de la Roche-sur-Yon (85), du CH de St-Nazaire(44), de l’OCHS (44).
Contact :Michel Normand, CHS Montbert, 44140 MONTBERT